Congo : Entretien avec Euloge Landry Kolelas Ministre-Haut commissaire à la réinsertion des ex combattants

Il ne se perd jamais en déclarations intempestives et a le triomphe modeste face aux réalisations qui suscitent pourtant l’admiration de tous. Le Ministre-Haut commissaire à la réinsertion des ex combattants, Euloge Landry Kolelas allie pragmatisme, réalisme, efficacité et pondération, tant dans ses fonctions régaliennes que politiques. Quand le président Denis Sassou N’Guesso lui confie le Haut commissariat à la réinsertion des ex combattants, beaucoup prédisent l’échec à Euloge Landry Kolelas, tant la tâche est immense et la mission quasi impossible au regard des pesanteurs que traverse le département du Pool. Pourtant, avec tact, l’homme se lance dans la bataille pour la paix, déroulant méthodiquement la feuille de route édictée par le président de la république, au point de redonner du sourire à des hommes et des femmes qui l’avaient perdu, et depuis, vivaient dans l’angoisse. À cœur ouvert, Euloge Landry Kolelas s’est prêté à nos questions.

Les Échos du Congo-Brazzaville : Monsieur le Ministre, l’an 2020 s’ouvre sur un réel satisfécit pour votre département, tant de partout, les populations dont vous avez la charge à travers le programme DDR, manifestent leur joie, surtout avec le volet socioéconomique qui leur redonne un réel espoir. Une joie partagée ?

Euloge Landry Kolelas : Je vous remercie de m’avoir donné l’occasion de vous dire du fond de mon cœur, ce que je ressens à travers l’œuvre accomplie en cette phase de consolidation de la paix et du démarrage du processus DDR dans le Pool : prélude au démarrage effectif du programme de Désarment, Démobilisation et Réintégration, (PDDR).

C’est vrai que je partage cette joie avec la population congolaise en général, et celle du Pool en particulier, du fait de la paix, la cohésion sociale retrouvée, la libre circulation des personnes, biens et services et la restauration progressive de l’autorité de l’État.

Cette grande joie résulte en définitive de la normalisation de la vie sur l’ensemble du Département du Pool.

Les Échos du Congo-Brazzaville : À mi-parcours, comment évaluez-vous le travail accompli.

Euloge Landry Kolelas : Au regard des actions menées et des résultats obtenus grâce à l’apport de toutes les parties prenantes, notamment, le Système des Nations Unies, à travers le projet « Consolidation de la paix et démarrage de processus DDR dans le Département du Pool », le travail accompli est positif, dans la mesure où il a posé les bases d’un bon démarrage du programme DDR.

Les Échos du Congo-Brazzaville : Asseoir la feuille de route reçue du Président de la République ne fut pas chose aisée, face à des partenaires parfois réfractaires. Pourtant, vous y avez cru. Dire que vous marchiez presque sur des œufs.

Euloge Landry Kolelas : Je suis un technicien à qui, Son Excellence Monsieur le Président de la République, Chef de l’État, a confié une mission, certes rude mais pour laquelle il a fallu définir des stratégies idoines pour atteindre des résultats escomptés par tous et pour tous.

Deux approches ont été envisagées : l’approche nationale et l’internationale.

Au niveau national, il a fallu convaincre toutes les parties prenantes, même les plus réfractaires sur les enjeux de la mission.

Au plan international, il a été adressé une requête aux Nations Unies pour un appui multiforme dont la réponse s’est matérialisée à travers le financement du projet « Consolidation de la paix et démarrage du processus DDR dans le Département du Pool » par le Fonds des Nations Unies pour la Consolidation de la Paix (PBSO).

Les Échos du Congo-Brazzaville : Beaucoup s’étonnent du fait que vous ne capitalisez pas ce succès pour asseoir davantage votre propre stature politique. Quelle est votre démarche.

Euloge Landry Kolelas : En ma qualité d’homme d’État, de responsable administratif et d’autorité publique, j’ai l’obligation et le devoir de dissocier les actions administratives et techniques que j’entreprends au nom de l’intérêt général, aux actions politiques, en tant que responsable d’une formation politique qui est le MCDDI.

Sachez que je sors de l’école d’un caméléon, j’ai cité le patriarche Bernard Bakana kolelas : « croire d’abord en ce que l’on fait pour l’intérêt de tous et non au profit personnel ou pour son propre compte ».

C’est autant dire que l’intégrité morale et éthique auxquelles je suis astreint, me mettent au service du peuple et de la Nation.

Les Échos du Congo-Brazzaville : Votre travail sur le terrain a davantage fait de vous un chantre de la paix.

Euloge Landry Kolelas : Merci de vos compliments. Je saisis cette occasion pour inviter le peuple congolais épris de paix à soutenir les actions entreprises dans le Département du Pool, pour consolider la paix dans l’ensemble du pays et surtout prévenir les crises postélectorales dans notre pays, au moment où nous sommes à l’orée des élections présidentielles de 2021.

Les Échos du Congo-Brazzaville : Un mot sur des partenaires qui vous accompagne dans cette mission ?

Euloge Landry Kolelas : Je tiens à féliciter tous les partenaires bi et multilatéraux qui nous accompagnent dans le processus de pacification du Département du Pool. Spécifiquement, j’apprécie le dynamisme du partenariat entre le Haut-Commissariat à la Réinsertion des Ex-Combattants et les agences du Système des Nations Unies chargées de l’exécution du projet « Consolidation de la paix et démarrage du processus DDR dans le Département du Pool », appelé parfois « Projet PBF », notamment, le Programme de Nations Unies pour le Développement (PNUD), le Fonds des Nations Unies pour la Population (FNUAP) et le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés (HCR).

Je n’oublie pas l’apport des partenaires nationaux impliqués dans la coordination du projet PBF, à l’instar de la Commission Ad hoc Mixte Paritaire, les points focaux des ministères techniques sans omettre le préfet du Pool, le Président du Conseil Départemental du Pool, les maires des deux communes de plein exercice (Kinkala et Kintélé), les Sous-Préfets, les administrateurs maires des communautés urbaines, les comités locaux de dialogue et de réconciliation, issus de plateformes locales, la société civile, les confessions religieuses et autres, notamment l’Église de Jésus-Christ des Saints des Derniers Jours.

Les Échos du Congo-Brazzaville : Vous êtes à la tête d’un parti qui est l’une des grandes composantes politiques du pays, le MCDDI. Comment se porte-t-il.

Euloge Landry Kolelas : Le parti que j’ai l’honneur de diriger est en pleine restructuration après avoir traversé une période difficile. Le socle idéologique est intact, la mobilisation des compatriotes autour des idéaux du patriarche continue son chemin. Notre ancrage et notre positionnement politique sont sans ambiguïté.

Le MCDDI se porte bien, pour preuve l’intérêt que vous portez sur notre parti.

Les Échos du Congo-Brazzaville : Votre allié le PCT a, à l’issue de son 5ème congrès, désigné Denis Sassou N’Guesso comme candidat à la présidentielle de 2021. Ce choix est-il aussi celui du MCDDI ?

Euloge Landry Kolelas : Les congolais sont d’abord rassurés sur l’issue apaisée du 5ème congrès ordinaire du Parti Congolais du Travail avec le choix politique de Monsieur Denis Sassou N’Guesso comme candidat à la présidentielle de 2021.

La décision du MCDDI de désigner son candidat à la présidentielle revient à la convention du parti qui sera organisée à cette occasion et lors d’une stratégie au sein de la majorité présidentielle.

Les Échos du Congo-Brazzaville : À travers le pays, on note un retour massif au MCDDI, des cadres et militants qui entre-temps, étaient ‘’allés voir ailleurs’’. Ils disent revenir à la maison-mère. Comment avez-vous accueilli ces retours.

Euloge Landry Kolelas : Le MCDDI est un socle idéologique, politique et social qui demeure une grande famille. Il est donc ancré sur des fondamentaux solides qui vont résister au temps. Tous nos concitoyens sont convaincus du rôle stabilisateur du MCDDI sur l’échiquier politique.

Dans ce monde souvent trouble, où les marchands d’illusions politiques sont nombreux, il convient d’être pragmatique et réaliste. C’est sans doute ce qui anime nos frères et sœurs de prendre le chemin du retour à la maison-mère et ils ont raison.

Notre parti se projette déjà pour les années à venir. Il est temps de se ressaisir et de cheminer dans l’unité, vers l’excellence démocratique.

Les Échos du Congo-Brazzaville : Un message ?

Euloge Landry Kolelas : Au seuil de cette nouvelle année, comme il est de tradition, je présente à tous mes vœux de bonheur, de santé et de prospérité.

Mon obsession est de pérenniser la paix et le développement socioéconomique dès lors que toutes les conditions optimales seront réunies sur l’ensemble du pays.

D’autres défis nous attendent, notamment ceux de la préservation de l’environnement, de la formation de nos jeunes, de la promotion de la femme, de la qualité et des conditions de vie des congolais. Pour que la paix soit durable, il faut penser Congo et non à soi.

Enfin, nous continuons de travailler pour le pays, tant au niveau national que départemental.

Interview réalisée à Brazzaville par Bertrand BOUKAKA/Les Échos du Congo-Brazzaville