Congo – Nécrologie : Le ministre Bernard Tchibambéléla s’en est allé !

L’ancien ministre Bernard Tchibambéléla est décédé mardi 21 mai aux environs de 3 heures du matin à Brazzaville. Souffrant subitement de douleurs atroces au bas ventre, il s'est subitement écroulé dans les escaliers de sa résidence, trouvant ainsi la mort en prensence de son fils ainé. L’homme qui tire sa révérence aura œuvré dans les hautes sphères de l’administration publique, avant d’embrasser la vie politique. Ce décès inopiné plonge une fois de plus la République dans le deuil.

Il s’est toujours défini comme un homme de devoir, Bernard Tchibambéléla l’aura prouvé toute sa vie, tant dans tous ses actes, il aura œuvré pour l’excellence, avec ce sentiment du devoir accompli, celui pour lequel on éprouve cette fierté d’avoir tout donné et de s’être investi sans compter.

Cette fibre qui distingue les grands hommes, Bernard Tchibambéléla la portait en lui, de par son engagement et son ardeur à labourer parfois les terrains en friche, comme pour tracer en éclaireur, un sentier pour les autres.

De fait, en 1982, Bernard Tchibambéléla conduit sur les fonds baptismaux le Crédit rural du Congo. Cette banque d’un type nouveau est sensée impulser l’action de ‘’retour à la terre’’.

Même si l’expérience s’y prête bien, le directeur général, Bernard Tchibambéléla se la joue modeste. Une pointe d’humilité qui a toujours dessiné sa personnalité, comme si lui, l’ingénieur agronome, docteur en économie et en droit rural, se disait : « le vrai mérite ne se montre point de fierté ».

Les mérites, Bernard Tchibambéléla les a enfilés comme des perles, sans qu’ils ne grisent son moi intérieur, tant il est resté attaché à ce qui a toujours caractérisé son existence, toujours donner le meilleur de soi-même, quel que soit la strate où l’on se trouve.

Aussi, l’homme aura été tour à tour, conseiller du Chef de l’État, directeur du CFCO, directeur de banque, tant en France qu’au Congo, ministre de la pêche et de l'aquaculture, enseignant à l'Institut de développement rural de l'Université Marien Ngouabi de Brazzaville, député et vice-président de l'Assemblée nationale à deux reprises.

Au plan politique, en 1989 Bernard Tchibambéléla, intègre le comité central du Parti congolais du travail. Il en part en 1991, suite à la création du Mouvement congolais pour la démocratie et le développement intégral (MCDDI), pour rejoindre son ainé Bernard Kolelas.

Homme d’une grande ouverture d’esprit et surtout attaché aux us et coutumes de son terroir, Bernard Tchibambéléla a toujours su garder ses racines, comme un levier dans la conduite des choses de la vie.

Homme de culture, Bernard Tchibambéléla a publié en 2009, deux ouvrages de belle facture, qui ont marqué les esprits.

‘’Le commerce mondial de la faim, stratégie de rupture positive au Congo-Brazzaville’’, paru aux éditions l’Harmattan.

Ce livre décrit la situation alimentaire des pays en développement avec en toile de fond l'Afrique, avec 200 millions de personnes qui souffrent de la faim. Le Congo Brazzaville regorgeant de vastes potentialités est capable de relever le défi. L'auteur propose d'y parvenir par la mise en œuvre de la stratégie de convergence, fondée sur les synergies du marché et de l'État. Celles-ci sont à même d'impulser l'émergence d'une agriculture cohérente, compétitive, fondement d'une croissance durable...

Le second livre s’intitule : ‘’Sur les ailes du temps – itinéraire d’une enfance africaine’’, un roman autobiographique de 139 pages, paru aux Editions Paari, Brazzaville.

Écrit à un moment où l’auteur se retrouve loin de son pays natal, ce roman qui tire son sujet dans le réalisme primaire congolais, apparait comme un véritable récit autobiographique car utilisant la narration homodiégétique.

C’est un roman de l’enfance des Congolais des années 40-50 qui se révèle avec l’odeur de Brazzaville et du Pool environnant dans une réalité kongo qui traverse le récit du début à la fin. Et des souvenirs qui accentuent l’univers des Congolais de ces années précitées tant les émotions que dégage le narrateur de ce récit sont fortes.

« Sur les ailes du temps » est l’histoire d’un jeune Congolais marqué par la période coloniale dans laquelle se dilue une partie de sa scolarité primaire. Une enfance qui construit un pont entre le village de sa mère et la ville avec son père au service du colon. Ce dernier n’a pas eu l’occasion d’aller à l’école qu’il impose à son enfant. Dès son enfance, celui-ci connait l’école indigène avec l’interdiction de parler la langue maternelle sous peine de tomber dans le piège du désagréable « symbole ».

Ce récit est plein de rebondissements de l’époque avec l’évocation du stade Yougos de Bacongo et des équipes comme La Macumba, La Squadra Azura et Dragons Noirs, des films tels Fû Manchu, Aigle blanc, Superman… Il conte la beauté de la jeunesse de Brazzaville des années 50-60.

Né le 14 juin 1946, à Brazzaville, Bernard Tchibambéléla est décédé le 21 mai 2025 à l’âge de 79 ans.

Bertrand BOUKAKA/Les Échos du Congo-Brazzaville