Congo – Report du versement du FMI : On va tout de même « bien manger les fêtes »

« Comment allons-nous manger les fêtes ? » autrement dit, « comment allons-nous passer les fêtes ». La question est sur toutes les lèvres à travers le pays, depuis qu’une radio internationale s’est faite « des choux gras » du report du traitement du dossier du Congo en décembre 2019 par le Fonds monétaire international (FMI) et partant, le non décaissement de la tranche de 48 millions de dollars initialement prévus pour janvier 2020.

Même si elles espéraient une issue plus favorable, les autorités congolaises s’attendaient presque à cette conclusion de la part du FMI, quant au décaissement de la seconde tranche. Des réserves conséquentes avaient été émises, lors de sa mission de novembre. À l’issue de cette mission, le FMI avait tiré la sonnette d'alarme, demandant au Congo de mettre les bouchées doubles pour respecter les engagements pris lors de la signature de l'accord en juillet. Il s’agissait en priorité, d’achever la restructuration de la dette commerciale extérieure et de mener les réformes attendues en matière de lutte contre la corruption, le tout avant la fin de cette année, des dossiers sur lesquels le gouvernement ne cesse de travailler.

Quoi qu’il en soit, le dossier du Congo-Brazzaville est pour l’heure écarté de l’ordre du jour du conseil d’administration du FMI, de décembre. Ce report signifie naturellement que le versement des 48 millions de dollars attendus en janvier par Brazzaville est reporté.

La nouvelle n’est pas certes reluisante, cependant, elle n’impacte pas l’exercice budgétaire en cours, tels que certains le font croire, au point que les congolais se sont soudain mis à désespérer, affichant clairement angoisses et incertitudes pour les fêtes de fin d’année et du nouvel an, des moments qui pour eux ont un sens si particulier, par delà leur aspect festif.

Le FMI n’a nullement fermé la porte au Congo, comme le clament ces pourfendeurs du Congo, qui se pâment d’aise de voir le pays courir vers des difficultés de trésorerie. Il s’agit d’un report dont l’issue dépendra des capacités du Congo à rentrer dans les clous, notamment en ce qui est de l’achèvement de la restructuration de la dette commerciale extérieure.

Mais sur ce terrain, le Congo négocie avec ses créanciers, et ne peut imposer sa volonté. Or, il est un fait constant et bien connu des économistes et surtout des financiers, les conditions de remboursement d’un prêt sont le plus souvent édictées en fonction des capacités potentielles de l’emprunteur à payer. Et en la matière, le Congo est un pays potentiellement riche, au point que ses prêteurs ont presque une attitude d’usuriers, car sentant poindre pour le pays des perspectives économiques meilleures. Reste pour le Congo, de trouver le juste milieu, afin non plus, de ne pas sacrifier l’avenir au présent. Et cela peut bien prendre du temps.

Il y a aussi les questions d’audit intérieur ainsi que de la lutte contre la corruption. Sur ces points, le président de la République avait ouvert le chantier en décembre dernier, appelant les institutions habilitées à sévir, ce sans préjugés, avec toute la rectitude de la loi.

Si au niveau des services de police, notamment la DGST, les investigations avancent, les dossiers s’amoncèlent par contre du coté de la Justice où on semble trainer le pas, comme si des pesanteurs inavouées refrénaient les ardeurs des juges.

Ainsi donc, avec cette décision venue du FMI, pour de nombreux congolais sceptiques et surtout les pourfendeurs du régime, 2020 n’augure pas une bonne année. Osons croire que ceux-ci se trompent car rien n’est définitif dans l’attitude du FMI, qui est plutôt vue comme un encouragement pour le Congo à se surpasser. De même, ce n’est pas la première fois que le Congo devra attendre, presque la mort dans l’âme, l’aboutissement d’un accord avec le FMI. Deux ans durant, il a déjà attendu, avant de déboucher sur la signature du programme en juillet dernier. Ce n’est pas pour autant que le pays se soit arrêté de tourner entretemps, même si la situation était difficile.

Des défis majeurs attendent les congolais pour 2020. Et le président de la République ne manquera pas de les égrener mardi prochain, dans son message sur l’état de la Nation. Ces défis interpellent tous les congolais, qui à l’unisson, doivent se surpasser, pour les relever. Bien souvent, c’est lorsqu’il est dos au mur, que le Congo exprime son génie et se sort de l’impasse, comme puisant dans cet instinct de survie qui uni et fédère.

L’informatisation et la traçabilité des opérations au niveau des régies financières laissent présager une amélioration dans le recouvrement des recettes qui naguère échappaient aux caisses de l’État et garnissaient les poches de certains fonctionnaires véreux. Ce manque à gagner désormais recouvré représente un indice non négligeable pour les finances publiques.

Reste qu’il y a encore des niches qui échappent aux caisses de l’État. Au niveau de la circulation routière par exemple, en dépit du fait qu’ils sont floqués d’un ‘’gros’’ numéro matricule dans le dos, les policiers qui s’en mettent encore plein les poches, sont loin de justifier leur apport aux finances publiques, à travers les amendes et autres taxes récoltées. De ce coté, l’usage d’un quittancier sécurisé voir le payement des amendes par des moyens électroniques seraient un début de solution. C’est à tous les niveaux que le combat contre les antivaleurs doit se mener.

Et les fêtes alors, bien sûr que nous allons « bien les manger », même si dans quelques jours, la question ce sera : « On va manger les fêtes, il paye quand ? »

Bertrand BOUKAKA/Les Échos du Congo-Brazzaville