Quelle politique pour le développement du secteur des transports au Congo-Brazzaville ? (Par Roger Ndokolo)

Il ne fait aucun doute que la qualité des infrastructures portuaires et aéroportuaires est globalement satisfaisante dans notre pays. Cependant, le domaine routier ainsi que les transports urbains et ferroviaires nécessitent une remise à niveau significative.

Le réseau routier congolais compte près de 21.000 km de routes principales mais 1900 km seulement sont bitumés. Comme 90% du réseau n’est pas bitumé, de nombreux axes routiers ne sont pas praticables en temps de pluie. La fluidité du trafic des biens et des personnes en est affectée, ce qui est contre-productif pour l’efficacité globale des transports et pour le fonctionnement des échanges commerciaux. Car cela réduit le volume de la production agricole et industrielle commercialisée. De plus, les deux grandes villes congolaises, Brazzaville et Pointe-Noire, ne sont pas dotées en équipements modernes de transport en commun. C’est pourquoi le taxi collectif reste souvent le moyen le plus praticable de déplacement, en sacrifiant malheureusement le confort des passagers.

Dans la totalité du pays, près de 250.000 véhicules sont immatriculés et seulement 56 transporteurs (entreprises et transports) sont enregistrés par la Direction générale des transports terrestres.

L’État est donc le grand perdant de cette absence de contrôle et de l’évolution du trafic dans l’informel. Le manque à gagner est très important en matière de taxes, péages et de toute autre activité dérivée. Il faudra donc faire de gros efforts pour remettre de l’ordre dans l’identification précise des immatriculations et augmenter ainsi les recettes fiscales de notre État.

Le réseau fluvial navigable congolais est très important, mais il est paradoxalement peu exploité. Les trafics voyageurs et marchandises sont en régression constante depuis 2009.

En pratique, le transport fluvial est encore loin de tenir ses promesses en termes de contribution au développement économique général. Il faut donc agir contre la vétusté et l’insuffisance de ses infrastructures, l’inadéquation de sa maintenance, la médiocrité de son cadre réglementaire et enfin revoir les nombreux obstacles non physiques qui entravent les déplacements.

Le Congo dispose de près de 800 km de voies ferrées. Ce réseau ferroviaire est en cours de réhabilitation depuis quelques années. Des marges de progression existent au niveau de la qualité du service mais il faudra réhabiliter des parties importantes du réseau : plateformes, ballasts, ouvrages d’art.

Déjà, la priorité est donnée au transport de marchandises considéré comme plus utile pour l’activité et plus rentable. Mais, il ne faudrait pas laisser de côté pour autant les transports de voyageurs qui, à terme, véhiculent une image d’efficacité et de sécurité tant pour le monde des affaires que pour le tourisme.

Dans les années à venir, l’exploitation optimale des ressources minières nécessitera l’extension du ferroviaire, afin de permettre une évacuation efficiente de la production d’extraction. Les opérateurs privés ont un rôle essentiel à jouer pour participer au développement et à la gestion des infrastructures de transports par voies ferrées.

En 2013, la société China Railways Construction Corporation International (CRCCI) et le Ministère congolais des transports ont signé un accord de partenariat pour la réhabilitation du Chemin de fer Congo-Océan. En 2015, l’Italie s’est prononcée pour faciliter le financement de la réhabilitation du CFCO et des ports fluviaux.

Par conséquent, il est possible et souhaitable de développer des accords et des partenariats mutuellement avantageux entre notre État et les sociétés privées si l’objectif est de parvenir à l’amélioration de nos transports et de notre logistique. Cela suppose que les accords signés aboutissent à de véritables synergies et coopération permettant d’améliorer l’organisation de nos infrastructures ferroviaires.

Aujourd’hui, une grande partie des compétences essentielles à la réussite de nos transports (urbain, fluvial et portuaire, ferroviaire et aérien), et de nos infrastructures est liée au « réseau de valeur » qui est constitué par tous les partenaires dont le pays est capable de s’entourer pour compléter et amplifier ses ressources. La performance n’est plus simplement individuelle, mais devient globale et donc collective. On ne peut obtenir de la qualité dans un océan de non-qualité. La force de nos infrastructures de transport devra reposer de plus en plus sur des effets de milieu qui mettent l’accent sur le processus de création de ressources, lesquels s’inscrivent dans la dynamique renforcée de nos territoires.

La condition du renouveau de nos transports et de nos infrastructures est de prendre des distances avec une mise en concurrence exclusive par les coûts en faisant émerger une offre de spécificité articulant entreprise, coopération, formation et recherche pour créer de la valeur. C’est dire toute l’importance qui devra être accordée à la formation des jeunes, au transfert et à la diffusion des technologies.

Cependant, si notre pays veut obtenir une « performance globale » qui rende compatible efficacité et justice sociale,il devra s’appuyer sur les progrès de son système de transports et améliorer sans cesse ses processus logistiques. Il sera alors en capacité de mettre en place de nouvelles stratégies de coopération privé-public, afin de faire de l’emploi et de l’élargissement de son marché les axes majeurs de son développement.

En rédigeant cette tribune, mon souhait le plus ardent est de voir un jour un tramway qui partirait de l’aéroport Maya-Maya, longerait le boulevard Denis Sassou N’guesso jusqu’au rond-point du stade Saint Denis à M’pila, remonterait l’avenue de France en passant par la basilique Sainte-Anne de poto-poto, jusqu’au sens giratoire de la coupole (une boucle). Nous pouvons le faire.

Roger NDOKOLO Président du parti du centre UNIRR

(Union pour la Refondation Républicaine)