L’hommage d’Alain Akouala à Pascal Lissouba

A l’annonce du décès du Professeur Pascal Lissouba, ancien président de la République du Congo (de 1992 à 1997), l’ancien ministre des Zones Économiques Spéciales (ZES), Alain Akouala Atipault est parmi les premiers hommes politiques congolais à réagir. Celui qu’on appelle affectueusement « Le Cerveau Bleu » salue la volonté du président fondateur de l’Upads, premier Président démocratiquement élu, qu’il a rencontré qu’une seule fois, à réformer le Congo.

« Hommage au Président Pascal Lissouba que je n’ai rencontré qu’une seule fois. À l’époque Consultant en communication du Comité de Privatisation j’avais été impressionné par sa volonté de réformer notre pays et son inquiétude sur la qualité des acteurs politiques du Congo », a écrit Alain Akouala Atipault, sur son compte Tweeter.

« Reposez en Paix Monsieur le Président », a-t-il conclu.

Âgé de 88 ans, Pascal Lissouba, est décédé à Perpignan en France où il s'était installé après un exil à Londres.

Né le 15 novembre 1931 à Tsinguidi, dans le sud-ouest du Congo, Pascal Lissouba était ingénieur agronome, titulaire d'un doctorat en sciences naturelles obtenu en France en 1958.

En 1963, après le renversement de l'abbé Fulbert Youlou, premier Président du Congo indépendant, il est nommé ministre de l'Agriculture, de l'Elevage, des Eaux et Forêts par le nouvel homme fort du pays Alphonse Massamba-Débat, dont il devient deux ans plus tard le Premier ministre.

Sur fonds de divergences avec lui, il quitte le gouvernement dès 1966. Il enseigne à l'université, mais revient en politique en 1968 au sein d'un Conseil national de la Révolution (CNR), organe formé après une révolte militaire pour dépouiller de fait de son pouvoir le Président Massamba-Débat.

Celui-ci finit par démissionner et Lissouba est durant six mois ministre du jeune nouveau président Marien Ngouabi, un militaire de 30 ans, avant d'être arrêté et jugé en compagnie de l'ex-Président Massamba-Débat et d'autres anciens de ses collaborateurs, accusés d'assassinats commis sous son régime.

Comme la plupart de ses coaccusés, Lissouba est acquitté mais interdit d'activités politiques. Il est à nouveau plusieurs fois arrêté, parfois emprisonné, entre 1969 et 1977, année de l'assassinat de Ngouabi, pour lequel il est condamné à mort avec d'autres, avant que sa peine soit commuée en réclusion à perpétuité.

Libéré en 1979, il s'exile en France durant plus de dix ans. Il devient alors professeur de génétique à l'université de Paris, puis directeur du secteur des sciences exactes et naturelles de l'Unesco, avant de prendre, à Nairobi, la direction du bureau africain pour la science et la technologie de cette organisation.

En février 1992, il rentre au Congo, à la faveur d'une "Conférence nationale" décidée début 1991 par le Président Denis Sassou N’Guesso, poussé par le vent de démocratie qui souffle sur le continent africain après la chute du Mur de Berlin et le discours de La Baule, dans lequel le président français François Mitterrand appelle à des réformes sur le continent. Une nouvelle Constitution est adoptée, consacrant le multipartisme, et Pascal Lissouba remporte la première présidentielle multipartite en 1992.

Fondateur de l'UPADS en 1991, Pascal Lissouba qui avait formé une alliance avec le PCT de Sassou N’Guesso pour gravir les marches du pouvoir, prend les rênes d'un pays de quatre millions d'habitants majoritairement jeunes, surendetté et dont l'économie est à genoux malgré d'importantes ressources pétrolières.

Son pouvoir est rapidement terni par les sanglants affrontements entre les milices formées sur des bases ethniques et régionales par les principaux dirigeants politiques. Un premier conflit éclate alors que le PCT majoritaire à l'Assemblée nationale n'obtient pas tous les postes clés du gouvernement qu'il avait demandés. Le parti de Denis Sassou N’Guesso entre alors dans l'opposition.

En représailles, le Président Lissouba dissous l'Assemblée nationale le 17 décembre 1992.

De 1993 à 1994, la contestation monte d'un cran. Un premier conflit fait plus de 2.000 morts en 1993-94 après des législatives contestées. Un accord de paix dissous officiellement les milices, mais elles continuent de faire régner la terreur à Brazzaville. Cependant, les accords visant à désarmer les milices et à les intégrer dans les forces de sécurité n'ont été que partiellement appliqués. Les différends concernant les élections se sont poursuivis et la violence s'est intensifiée à l'approche des élections de 1997.

En 1997, le pays en campagne présidentielle plonge dans la guerre civile. Plusieurs mois de combats meurtriers (entre 4 et 10.000 morts) opposent dans Brazzaville les milices de Lissouba et celles de son Premier ministre Bernard Kolélas aux "Cobras" de Denis Sassou N’Guesso. Appuyés par des troupes angolaises, les Cobras prennent finalement la capitale.

Lissouba s'exile et s'installe à Londres, puis en 2004 à Paris, après avoir longtemps accusé la France et la compagnie pétrolière Elf d'avoir aidé le président Sassou N’Guesso à le chasser du pouvoir.

L’Etat est prêt à s’associer à l’organisation de ses obsèques et reste attentif à la position de la famille, selon le porte-parole du gouvernement congolais, Thierry Moungalla.

Il y a quelques mois à peine, un autre ancien dirigeant congolais, Jacques Joachim Yhombi-Opango, qui a dirigé le Congo-Brazzaville entre 1977 et 1979, décédait lui aussi en France des suites du Covid-19 à l'âge de 81 ans.

Germaine MAPANGA / Les Echos du Congo-Brazzaville