Congo – Infrastructures routières : Les « Grands Travaux » trompés ou consentants sur les malfaçons?

En dépit de l'incivisme de certains citoyens qui de par leurs pratiques obstruent les canaux d'évacuation des eaux usées, les pluies de ces derniers jours à Brazzaville ont montré l'étendue des malfaçons, sinon de la tromperie que cachent de nombreux chantiers dont certains sont en cours d'exécution, et qui ne répondent pas aux règles de l'art.

À Ouenzé, la réfection de Madoukou a réduit ses capacités d'encaissement, d'où les innondations

Des canalisations étriquées, réalisées apparemment sans études préalables sur la quantité d'eau qu'elles devraient recevoir, des routes dont la couche de roulement posée à même le sable tient à l'épaisseur d'une feuille de papier, le système de drainage des eaux remontant à contre-courant et créant la stagnation de celles-ci, autant d'imperfections sont notées sur des ouvrages d'assainissement réalisés dans la ville capitale ou sur des tronçons de route en cours de construction et qui ont déjà disparu avant même de n'avoir été réceptionnés. Les dégâts ont été constatés jusque dans les églises, en pleine messe.

La route décapée montre l'étendue de la tromperie, un filet de bitume posé sur le touvenant

L'incurie est telle que pour de nombreux congolais, des deux choses, l'une. Ou il y a « tromperie sur la marchandise », pour ces entreprises, presque toujours les mêmes et qui ont montré leurs limites, ou les services du ministère des Grands Travaux sont consentants, car ces entreprises agissent impunément au long des ans, en dépit de la mauvaise exécution des travaux qui leur sont confiés.

Dire qu'elles engrangent davantage de marchés, comme si les malfaçons qu'elles essaiment partout étaient un label d’efficacité pour la sélection.

L'explosion de la dette congolaise résulte en grande partie des travaux d’infrastructures. Certaines sont déjà plus qu'amorties, sinon détruites, alors que la dette, elle, court encore. Cela donne le sentiment de régler une dette dont on ne garde aucun avantage.

Dans de nombreux quartiers désormais sinistrés du fait des intempéries, avec ô paradoxe, des travaux fraîchement achevés, ou en cours, pour éviter lesdits sinistres, les populations se demandent comment les Grands Travaux accordent-ils leur certification sur les ouvrages réalisés.

Entre incivisme et ouvrages au rabais, les conséquences sont énormes

La colère est d'autant plus grande, que jamais, les avis des riverains ne sont pris en compte lors des études préalables à la réalisation des travaux. L'entreprise et les « érudits » des Grands Travaux décident le plus souvent en parfaite méconnaissance des spécificités du terrain sur lequel ils interviennent. C'est après qu'ils réajustent, quand ils sont mis devant le fait accompli. Les travaux sont exécutés avec des coût à rallonges qui n'émeuvent personne, tant que l'argent sort des caisses de l'État.

Deux morts à Talangaï, suite à la dernière pluie. Des décès pour pour lesquels personne ne sera tenu pour responsable.

Des canalisations aux débits d'eau sous-évalués, pour lesquels personne ne rendra de comptes.

Des routes emportées par les eaux, du fait de l'inconsistance des matériaux ou de leur non protection élémentaire requise et personne n’émettra de réserves.

Autant de choses pour lesquelles les populations seraient tentées de dire comme Marien Ngouabi, « il faut que ça change !». Mais, seraient-elles seulement entendues, et par qui ?

Il y a de quoi reprendre de façon somme-toute personnelle, ces mots de Henri Lopes dans Tribaliques : « Plus j'y pense, moins j'ai envie d'écrire mon papier. On le lira peut-être. On frappera du point sur la table. Mais, aucune entreprise de travaux publics ne sera sanctionnée. Floués ou consentants, « Les Grands Travaux » continueront de fermer les yeux sur les malfaçons, et l'État, d'être saigné à blanc ».

Bertrand BOUKAKA/Les Échos du Congo-Brazzaville