Les obsèques de Mireille Eurydice Mampouya, décédée le lundi 14 avril 2025 à l’hôpital du Sud-est Francilien de Melun, ont eu lieu le vendredi 25 avril, avant l’inhumation au nouveau cimetière du Mée sur Seine. L’affluence qui a marqué les veillées funèbres organisées toute la semaine en sa mémoire s’est poursuivie jusqu’à l’enterrement, après une procession à travers quelques artères de la ville, preuve que chacun voulait témoigner de sa reconnaissance à cette dame dont tous ont relevé la générosité, le sens de l’amitié et de l’assistance envers les autres. Un élan de cœur qui ne pouvait laisser indifférent.
Comme Eurydice, dans le mythe d’Orphée, Mireille Eurydice Mampouya « est happée par le séjour des morts » alors que la lumière du jour luisait de plus de plus en plus sur elle.
Lundi 7 avril, suite à un malaise, Mireille est admise à l’hôpital du sud-est francilien de Melun. La nouvelle se répand telle une trainée de poudre. Toute une ville du Mée sur Seine retient son souffle, dans l’attente de nouvelles plus rassurantes.
Hélas, l’irréparable se produit le lundi 14 avril. Toute la ville, sans distinction de races, de cultures, ni de religions, est concernée par ce deuil.
Tout le monde est d’autant plus concerné que lorsque se pose le problème d’un espace assez vaste pour contenir l’afflux de personnes qui outre Le Mée sur Seine, viennent de Rennes, Sainte Geneviève-des-Bois ou encore Villeneuve-Saint-Georges, pour honorer la mémoire de Mireille dans la pure tradition des veillées congolaises, la communauté musulmane casse les codes en cédant gracieusement à des non musulmans, son ancienne mosquée, devenue salle annexe, pour l’organisation des veillées.
De son vivant, Mireille a planté les graines de la bonté qui ont germé et en cette ultime occasion de le lui rendre, tous veulent témoigner de leur reconnaissance à cette femme qui a toujours donné sans compter.
Jeudi soir, la dernière veillée a drainé autant de monde que la salle d’un peu plus de 1000 places a semblé minime.
Devant l’autel dressé tel un cénotaphe, où est placée la photo de Mireille, on a chanté, défilé, témoigné toute la nuit, jusqu’au matin.
Ses compagnons du Collectif du Mée ont surmonté l’autel du gilet fluo que Mireille endossait, ainsi que sa pince à ordure comme pour témoigner de cet engagement pour la salubrité de la ville qu’elle aura tenu jusque dans ses derniers instants.
Mireille Mampouya s’en est allée et soudain, sa mort a fédéré autour d’elle les témoignages des actions accomplies pour les autres, et qui ont révélé une femme de cœur, celle qui tendait ses bras à tous et dont on oublie pas les bienfaits.
Sa fille Prusia Denga témoigne:
« De maman, je garde le souvenir d’une femme brave, courageuse, qui a aimé, aidé et qui nous a transmis le sens du partage. Elle nous disait toujours qu’une maison, plus elle reçoit, plus elle s’agrandit. C’est une maman dont on peut témoigner dans tous les foyers. Elle a tellement fait, qu’il n’y a aucune maison qui ne peut pas témoigner d’elle. Lorsque j’arrive en 1986 à Villeneuve-Saint-Georges, dans un studio, ils étaient déjà en train d’héberger beaucoup de personnes, beaucoup d’oncles. En partant de Villeneuve-Saint-Georges, papa et maman n’ont jamais abandonné ce logement, parce que ça devait être un pied-à-terre pour tous les frères et sœurs qui viendraient par la suite depuis le pays. Arrivés au Mée sur Seine, nous n’avons jamais vécu qu’avec papa et maman, ma fratrie et moi. Nous avons toujours été avec des oncles, quitte à avoir des double-lits superposés. Cette emprunte restera en nous. »
Justement, Mireille écoute, assure, rassure, assiste, conforte et soutient autour d’elle. Des amis, des proches ou des connaissances parfois dans le doute ou en perte de repères.
Ses paroles sont si conciliantes, réconfortantes, rassurantes, que petits et grands ont recours à elle tel un refuge.
Tous l’adoptent. Hors de son foyer, Mireille est également « Mère », « Tata » « Sœur » « Fille », tant tous les âges trouvent en elles une personnes en qui se confier, avec le sentiment de se sentir soulagé et apaisé.
Dans la ville du Mée sur Seine où la famille emménage après Villeneuve-Saint-Georges, Mireille est précédée par les qualités humaines qui font qu’elle ne peut plus passer inaperçue.
Pour les stagiaires congolais en formation à l’école des officiers de gendarmerie de Melun, « Mère Mireille » devient une marraine.
Coïncidence ou signe du destin, le colonel de gendarmerie Mesmin Atiga s’est retrouvé en France en cette circonstance douloureuse. Présent aux obsèques, il a dû transcender son affliction pour témoigner au nom de ses frères d’armes, de ce que « Mère Mireille », ainsi que tous l’appelaient avait pris une grande place en chacun d’eux, lors de leur passage à Melun.
« Nous gardons de bons souvenirs, parce qu’à travers elle nous gardions un trait-d’union avec le pays. De temps en temps, elle nous concoctait des mets du pays. Nous ne l’avons jamais oublié. Vingt-cinq ans que nous avons été à Melun mais elle reste toujours présente en nous et le liens tissé avec elle reste si fort, comme avec tous les autres qui sont venus après. Dans les moment d’abattement, elle trouvait toujours des mots pour nous conforter à persévérer. À la survenue de ce douloureux évènement, tous les collègues étaient partagés entre le doute et l’acceptation de la fatalité, se disant : « pas elle ! » Hélas… C’est triste ».
Les qualités humaines de Mireille ont essaimé au Mée sur Seine. Elle qui a toujours été animé par l’ardent désir de se rendre utile en se mettant au service des autres, a été confortée dans sa passion, à travers « Le collectif du Mée », une association qui mène des actions d’assainissement à travers la ville. Mireille et son mari y donnent d’un peu de leur temps libre pour des actions de salubrité.
Outre ses qualités personnelles qui font d’elle une femme d’exception, cet acte citoyen permet à Mireille d’agir et d’œuvrer pour la collectivité. Franck Vernin, maire du Mée sur Seine garde d’elle le souvenir d’une personne très impliquée pour sa commune et qui aimait les gens.
« Elle était très impliquée sur la commune du Mée sur Seine. Elle avait intégré le collectif du Mée, des personnes qui le dimanche matin, venaient ramasser les déchets pour que la ville soit propre. Mais surtout, c’est une personne qui aimait les gens, quelques soient les personnes qu’elle rencontrait. Je ne l’ai jamais vu médire sur qui que ce soit. Elle avait des propos toujours de bienséance, de bienveillance. Quelqu’un qui nous manque déjà ! »
En ce vendredi 25 avril, jour des obsèques, c’est comme si le temps s’était arrêté sur la ville du Mée su Seine. Les foules ont convergé de partout pour l’ultime hommage à Mireille.
Après la chambre funéraire pour la levée de corps, puis l’absoute à l’église, le cortège s’est ébranlé en une procession jusqu’au cimetière.
Encadrée par la police municipale, par dérogation du maire, le cortège a fait un détour par l’Allée de la gare. Une avenue chargée de symboles pour Mireille, car non seulement son domicile s’y trouve, mais c’est également là qu’avec ses amis du Collectif du Mée, ils se retrouvaient le dimanche pour débriefer, après leur activité d’assainissement.
Une première halte, à cette intersection où le Collectif se retrouvait. Les chants d’adoration fendent le silence.
La deuxième halte, à l’entrée de la résidence où Mireille a vécut avec sa famille, est ressentie avec une profonde émotion. Le corbillard s’immobilise. La foule applaudit. Le moment est magique, comme si Mireille adressait un aurevoir à ceux qu’elle a aimés.
Enfin, une troisième halte en cet endroit où Mireille fut prise de malaise. Encore de applaudissement, comme pour expurger cette passe difficile.
Le convoi s’ébranle vers le cimetière. Ce nouveau cimetière de la ville où elle est la première femme congolaise à y être enterrée.
Les femmes font le dernier tour du cercueil au son des louanges du terroir, pour recommander l’âme de la défunte à Dieu.
Avant l’inhumation, l’assistance s’est livrée à un dernier rituel, pour faire la volonté de la défunte qui dans les derniers jours avant sa mort, demandait qu’au cas où cela se produirait, que cet ultime moment de son départ soit arrosé de champagne.
Comme dans un ultime témoignage d’amour, le cercueil blanc reflétant la pureté de l’âme de Mireille a été décoré de papillons.
Le papillon, est considéré comme le symbole le plus célèbre de la transformation. Le papillon symbolise aussi le bonheur, la beauté, l’inconstance, l’éphémère de la nature et le renouveau. Pour les chrétiens, le papillon symbolise les étapes de la vie, de la mort et de la résurrection.
Mireille Eurydice Mampouya a été inhumée en présence de son père, de son époux et ses enfants, du maire de la ville, de ses amis du Collectif, mais surtout, cette foule d’amis ou d’anonyme en qui elle a semé la graine de l’amour.
Cet amour qui tel un héritage, vivra éternellement dans le cœur de ceux qui l’ont connue.
Adieu Mireille Eurydice Mampouya !
Bertrand BOUKAKA/Les Échos du Congo-Brazzaville