Remplir son réservoir d’essence à Mossendjo, la deuxième ville du département du Niari (sud)? Une mission de plus en plus difficile. Mieux vaut ne pas se retrouver sur la réserve à Mossendjo sans une adresse de pompe à essence en tête et pour cause, la commune qui connaît une croissance démographique remarquable (13.005 habitants), n’en compte plus depuis plusieurs décennies.
Si la tendance est globale dans la région (Makabana, Mossendjo, Mayoko, Mbinda), Dolisie, est la seule ville dans le département du Niari, à avoir gagné quelques adresses.
Mais dans certaines zones rurales, trouver une pompe devient de plus en plus difficile.
Dans les années 80- 90, Mossendjo comptait deux stations-services de la société Hydro Congo.
En août 2002, les autorités congolaises ont décidé de dissoudre la société d’Etat chargée de la distribution des hydrocarbures, Hydro Congo, franchissant ainsi un pas important dans le processus de privatisation du secteur pétrolier. Elle comptait 720 employés et commercialisait chaque année 300.000 tonnes d’hydrocarbures pour un chiffre d’affaires de 10 milliards de Fcfa.
Plusieurs stations-services traditionnelles, celles que l’on trouvait en campagne, ont baissé le rideau. A Mossendjo aussi.
Pour l’instant, personne ne peut prédire l’issue de cette situation. Les automobilistes de la ville de Mossendjo vont se ravitailler à Dolisie (186,78 km).
A noter qu’à Mossendjo, plusieurs jeunes étranglés par le chômage, se sont engagés dans la débrouillardise, notamment les « khadafi ». Leur raison sociale ? Vendre dans les rues les carburants et autres produits sur les étagères en bois ou à même le sol : essence, mazout ou gazole, la graisse, du pétrole et l’huile pour moteurs dans des bidons en plastiques de 25L, 10L, 5L, 1L.
Pas un coin de Mossendjo sans Kadhafi (carrefour Chamoukoualé, marché Makoulou-Ngoulou...). Un métier à haut risque parce que ces compatriotes ne disposent ni d’équipements de protection individuelle (EPI), ni d’autorisation pour exercer ce métier en plein air.
Pour la petite histoire, ce nom tire son origine du feu président de la Lybie, Mohamed Kadhafi, parce qu’à une certaine époque la Lybie fut le premier pays africain producteur du pétrole.
Malgré qu’ils soient souvent accusés de vendre des produits de mauvaise qualité, mélangée avec de l’eau, les Kadhafi rendent des bons et loyaux services à la population.
Les statistiques sur le nombre des « kadhafi » au Congo-Brazzaville ne sont pas disponibles.
Mais où est-ce qu’ils s’approvisionnent en carburants ?
Selon notre source, avec l'actuelle pénurie de carburant, des pompistes véreux, en complicité avec certains conducteurs de camion-citerne détournent les produits pour les faire revendre par les « Kadhafi », avec une plus-value qui procure à toute la bande des dividendes confortables.
Ainsi, frères, sœurs ou femmes de pompistes se sont transformés en « Kadhafi » jamais à sec, alors que le produit manque dans les stations-services où les personnes en quête de carburant blanchissent des nuits ou attendent de nombreuses heures, dans des files interminables avant d'être servis.
Parfois, après la rupture du stock, c'est le pompiste qui renseigne les automobilistes sur l'endroit où ils peuvent trouver un « Kadhafi » proposant un bon produit, celui sans additifs quelconques.
Jean-Jacques Jarele SIKA / Les Echos du Congo-Brazzaville