Le Congo, pays à forte population jeune a créé une agence afin de permettre à ceux-ci, l’opportunité de création d’entreprise, dans un délai de rigueur, ACPCE (Agence Congolaise pour la Création des Entreprises. Cette structure, qui a pour mission de faciliter et de simplifier les formalités de création d’entreprises, en permettant aux créateurs d’entreprises d’effectuer en un lieu unique les lois et règlements. Au sujet de la création de l’entreprise dans les 72 heures par le jeune Congolais, le Directeur Général de l'ACPCE, Monsieur Emeriand Dieu-Merci Kibangou, répond à quelques questions de notre confrère Mesmin Obambé de Radio Congo, à travers le journal de dimanche '' Le 7 H DOMINICAL'' dans cette interview exclusive :
Les Echos du Congo-Brazzaville : Monsieur Emeriand Dieu-Merci Kibangou, vous êtes à la tête de l’Agence Congolaise pour la Création des Entreprises (ACPCE) où l’on parle de l'entrepreneuriat, avec pour conséquence l’emploi ! M. le DG, en Français facile, que veut dire ACPCE ?
Emeriand Dieu-Merci Kibangou : L’ACPCE, entendez, Agence Congolaise pour la Création des Entreprises, qui est une structure sous-tutelle du Ministère des Petites et Moyennes Entreprises et de l’Artisanat, dirigé par Madame Jacqueline Lydia Mikolo. Elle a été créée par loi, loi n° 16-2017, du 17 mars 2017, mais qui naît des cendres du Centre des Formalités des Entreprises (CFE).

Donc, pour la petite histoire, la création du CFE, jusqu'à même à la CPCE et la matérialisation de la vision du chef de l'État pour simplifier et faciliter la création, partant de là, le développement économique de notre pays. Pour ainsi dire, les personnes un peu moins jeunes savent à peu près qu'il y a quelques années, créer une entreprise au Congo était un véritable parcours du combattant. Il fallait des fois même avoir l'avis de la sécurité d'État, pour avoir le droit de créer l'entreprise. L’évolution de la CPCE, du CFE à l’ACPCE aujourd'hui, illustre en réalité l'évolution, le virage idéologique, économique de notre pays, qui était au début un peu renfermé dans le cadre du marxisme-léninisme, qui un peu plus tard, commence à devenir un peu une social-démocratie et une économie relativement ouverte aujourd'hui.
LECB : Depuis quand êtes-vous à la tête de cette structure, quelles sont les missions assignées à vous ?
EDMK : Effectivement, c'est depuis le 15 février 2022 que nous avons été installés dans nos fonctions de directeur général au niveau de l'assurance de la CPCE. Nous avons principalement quatre missions : 1-accueillir, informer et orienter les personnes physiques ou morales ; 2-recevoir et traiter les dossiers de déclaration des formalités ; 3-délivrer tous les documents nécessaires pour la création, modifications et radiations des entreprises ; 4-créer et tenir le fichier national des entreprises.
LECB : Où se trouve le siège de l'ACPCE ?
EDMK : À Brazzaville, nous sommes sur l'avenue Emile Biayenda, ex-Foch à côté de La Mandarine. Nous avons aussi des sièges départementaux à : Pointe-Noire, Dolisie, Nkayi, Owando et Ouesso.
LECB : Quelles sont les obligations des chefs d'entreprise ?
EDMK : En réalité, sur ces obligations, je crois que nous pourrons être fiers de le dire, parce que Mme le ministre a tenu à mettre en place, à instituer ce qu'on appelle la licence unique d'exploitation des entreprises, qui est un document de référence d'une entreprise, qui dispose en sens sein, de toutes les obligations comptables, fiscales et sociales de l'entreprise. L'entreprise a principalement ces trois obligations, c'est-à-dire, quel est l'impôt que je vais payer, grâce à ce document qu'on vous donne gratuitement à l'ACPCE. Grâce à ce document, vous pouvez savoir quel impôt je dois payer. Aussi, quelles sont les différentes obligations sociales, tout ce qui est lié aux cotisations sociales, la CNSS, paiement de la CAMU, etc. Et mieux, vous avez des fois aussi le calendrier fiscal, savoir qu'à telle date, voilà les impôts que je dois payer, à telle date, voilà les cotisations sociales que je dois payer, mais également comment je tiens ma comptabilité. Ça permet à ce que quand l'administration publique, donc les fonctionnaires que nous sommes, nous nous rapprochons de l'entreprise, l'entreprise ne soit pas surprise par les informations qu'on lui demande de mettre à notre disposition, afin de réduire à ce que nous appelons des fois les tracasseries administratives que les chefs d'entreprise ont souvent dans notre pays essayé de décrier. Donc, cette licence permet de rompre avec cette pratique d'un autre monde qui, en réalité, permettra de libérer les énergies pour que les chefs d'entreprise puissent se concentrer sur ce qu’ils savent faire le mieux, c'est-à-dire créer de la richesse.

LECB : Combien d’entreprises enregistre-t-on au Congo ?
EDMK : Ça, c’est véritablement le nœud gordien, comme on dit. Nous avons cette difficulté pour répondre à cette préoccupation avec le temps, avec le développement de l'informatisation et peut-être les contraintes liées à l'archivage, qui est quand même un défi de notre pays, il faut quand même se l'avouer ; nous n'avons pas eu la possibilité d'avoir la maîtrise des entreprises qui existent au Congo. Parce que, y a certaines entreprises qui ont existé depuis les indépendances, qui existent encore aujourd'hui, on ne va pas les citer. Il y a beaucoup d'entreprises qui existent depuis 1960 dans notre pays qui continuent à exister.
Nous avons des administrations qui malheureusement, ne sont pas encore passées à l'heure du numérique. Donc ça fait que, archiver un nombre incalculable de données physiques, peut poser des fois un problème. Donc, ça nous a posé quelques petits soucis. Mais, qu'à cela ne tienne, depuis un certain temps, depuis 2022, depuis 2022, nous avons essayé de mettre en place la dématérialisation des formalités administratives. Aujourd’hui, l'ACPCE est l'une des administrations au Congo qui est intégralement digitale.
[…] A la date d'aujourd'hui, nous avons environ 35 000 entreprises dans notre base de données. Pour que vous ayez une idée, pendant que nous disposons de 35000 contribuables, 35 000 entreprises dans notre base de données, les impôts, ils ont autour de 10000 entreprises qui payent au moins la patente et l'Institut national de la statistique, grâce au REGEC, qui est public, avait dénombré 4 900, c'est-à-dire 5 000 entreprises. Donc vous voyez là alors que l'INS et les impôts, c'est depuis 1960, sont à 5000 et 10000, l'ACPCE de 2017 environ, nous sommes à 35 000 contribuables. On n'a pas dit que les 35000 qui sont dans nos fichiers tous existent parce qu'il y a des entreprises aussi qui meurent après leur existence.
Aujourd'hui, ce fichier, il est disponible, nous travaillons avec. Madame le ministre, Jacqueline Lydia Mikolo, naturellement, travaille avec le Ministère des Finances naturelles, principalement pour voir dans la mesure du possible comment on peut créer les synergies afin que cette mine d'informations qui est à notre disposition soit exploitée au niveau de l'essentiel de notre territoire national.
LECB : Quelles sont les formes d'entreprises disponibles, la catégorisation d'entreprises ? Avec 35 000 entreprises, on a l'impression que le taux de chômage va tout de suite diminuer au Congo.
EDMK : Il faut peut-être aussi nuancer, effectivement quand on dit 35 000 entreprises pour notre pays, on a souvent l'impression que c'est énorme. Mais quand on rapproche ça à d'autres pays, c'est vrai que ce n’est pas la même population, le chiffre de 35 000 est relatif. Je crois que des pays comme la Côte d'Ivoire, crée jusqu'à 20 000 entreprises par an. C'est pour dire que tout dépend de la taille de l'entreprise, etc.
La catégorisation, est véritablement l'une des problématiques dans notre pays. La catégorisation est définie par la loi. Nous avons la loi 46 ainsi que le Code général des impôts dans certains articles, qui définit la catégorisation, c'est-à-dire qui est grande entreprise et ceux qui font un chiffre d'affaires supérieur à 2 milliards, qui est moyenne entreprise, c'est ceux qui font un chiffre d'affaires entre 100 millions et 1 milliard 999 millions, et qui est petite entreprise, c'est ceux qui sont entre 25 millions et 100 millions, et qui est très petite entreprise, Madame le ministre aime bien dire microentreprise, c'est ceux qui sont entre 0 et 25 millions. Mais il y a d'autres variables à intégrer en dehors du chiffre d'affaires, il y a ce qu'on appelle la forme juridique. Parce qu'une entreprise individuelle a certaines obligations qu'une Société Anonyme ou une Société à Responsabilité Limitée n'ont pas. C'est-à-dire que si vous êtes au moins S.A, vous êtes tenu d'avoir ce qu'on appelle un commissaire aux comptes. C'est la raison pour laquelle une entreprise qui gère beaucoup de milliards, à partir de 2 milliards déjà, est tenu d'avoir un commissaire aux comptes. Et commissaire aux comptes, ça veut dire que vous êtes forcément une société anonyme (S.A). Donc nous avons souvent ou malheureusement certaines entreprises qui sont dans une forme qu'on appelle au Congo établissement, mais en réalité le nom juridique c'est, entreprise individuelle, mais qui font des fois plusieurs milliards au niveau des comptes, au niveau des banques, mais qui n'ont pas la forme juridique requise. Et ça fait que quand c'est comme ça, la tenue de la comptabilité pose un problème, ça fausse les calculs, et surtout des fois même l'impôt qu'on est censé payer, on ne le paye pas. C'est une perte énorme pour l'État, c’est une perte de recettes fiscales importante, parce que l'entreprise individuelle continue à demeurer souvent au régime du forfait, et des fois elle sous- déclare même son chiffre d'affaires pour toujours être considérée petite, alors que sur les chiffres que les banques et les transactions financières qu'ils arrivent à faire témoignent véritablement que nous avons là une grande entreprise. Donc ça, c'est véritablement un chantier que, grâce au partenariat que nous avons noué avec UNOC, (Union nationale des opérateurs économiques congolais), avec Unicongo et également les autres patronats, nous essayons d'emmener les chefs d'entreprise, parce qu'ils étaient forcément habitués à certaines pratiques, afin qu'ils puissent se conformer pour l'intérêt de tout le monde, parce qu'en réalité, si vous voyez par-là, si on arrive à valoriser tout ceci, on se rendra bien compte que le niveau de création de richesses, qu'on appelle le PIB dans notre pays, est naturellement sous-évalué, parce que si chaque entreprise sous-évalue sa déclaration, ça veut dire qu'on sous-évalue notre PIB, donc avec toutes les implications que cela peut avoir sur le niveau d'endettement.
LECB : Quels sont les éléments qu’il faut pour créer son entreprise ?
EDMK : Nous aimons bien utiliser ce mot de Mme le ministre Mikolo. Nous avons ’’exorcisé’’ la création d'entreprises parce qu'avant, c'était mystifié. En réalité, pour créer l'entreprise au Congo, vous avez juste besoin de votre pièce d'identité et de votre contrat de bail plus 25 000 F.CFA, au lieu de 100 000 Francs.

LECB : L’initiative un jeune, une entreprise, qu’est-ce ?
EDMK : Le chef de l'Etat a déclaré en 2024, année de la jeunesse. Mme le ministre des petits et moyennes entreprise et de l'artisanat, Mme Jacqueline Lydia Mikolo, en a fait son cheval de bataille et, elle a dit qu’il faut bien que je puisse apporter également mon bilan sur cette année de la jeunesse. Donc en ce qui concerne son département, en ce qui concerne l'année de la jeunesse, elle a mis en place ce qu'on appelle le projet « un jeune, une entreprise ». Un projet qui est accompagné par des partenaires comme le PNUD, ainsi que d'autres partenaires, mais principalement le lead des partenaires est assuré par le PNUD. Grâce à ce projet, il est question en réalité d'informer, de former, d'aider à la création d'entreprises et enfin soutenir d'un point de vue financier ou non financier le jeune qui veut sauter le pas de l'entrepreneuriat. Donc si vous multipliez les 75 000 fois 2579 avec un million fois le même nombre, vous vous trouvez que l'ACPCE a apporté aux jeunes Congolais, grâce au leadership de Madame le ministre Jacqueline Lydia Mikolo, pratiquement 3 milliards de francs à 5 milliards d'appui direct aux jeunes dans le cadre de cette année de la jeunesse. L'objectif est de toucher le maximum de jeunes. Il y avait un chiffre qui avait été donné en son temps, de 100 000 jeunes. L'ambition était de 100 000, mais là, on est encore à 2 579.

LECB : Est-ce que vous avez le suivi des entreprises qui sont créées, qui sont sur le terrain ? Aussi, pourquoi certaines d’entre elles meurent-elles si tôt ?
EDMK : Quand je dis qu'on a 35 000 entreprises, c'est parce que j'ai les actes de naissance de ces 35 000 entreprises. Je peux vous les donner pour dire les voilà. Maintenant, quand on parle de la mort d'une entreprise, je dois avoir les actes de décès, c'est parce que malheureusement, dans notre pays, les chefs d'entreprise, quand ils ont fait... Quand ils ont déclaré liquidation, ils laissent l'entreprise et puis ils sont partis. Ils ne font pas la formalité nécessaire pour radier son entreprise. C'est la raison pour laquelle, au Congo, personne ne connaît le taux de radiation des entreprises.
LECB : Y a-t-il des femmes qui créent les entreprises ?
EDMK : Bien sûr ! Là, je vais prendre juste, ne serait-ce que pour 2024. En 2024, nous avons 26,2% des femmes qui créent les entreprises, sur l’intégralité, c’est vrai que c’est un peu moins d’un tiers, mais, nous avons ce chiffre. Et quand on regarde dans les détails, vrai que c'est un peu moins d'un tiers, mais nous avons ces chiffres. Et quand on regarde dans les détails, c'est le département du Pool, avec 28,4% qui a les femmes les plus entrepreneures. Brazzaville crée jusqu'à 40% de plus que Pointe-Noire. En français facile, quand on crée 100 entreprises à Brazzaville, Pointe-Noire en crée environ 60%. Le chiffre est énorme.
Pour terminer, je voudrai vous remercier très sincèrement. Et, j’en appelle à tout jeune congolais, de s’impliquer résolument à sa prise en charge. Créer une entreprise dans un laps de temps, c’est possible. En 72 heures, vous êtes chef d’entreprise, ni problème ni tracasserie. Grâce à l’ACPCE bien évidemment !
Propos transcrits par VALDA SAINT-VAL / Les Echos du Cogo-Brazzaville / Source : Radio Congo