Bête noire des pousse-pousse, l’entrée fracassante des tricycles motorisés de marque asiatique Kavaki Motor, dans le monde du transport urbain à Brazzaville, la capitale congolaise, a soulevé, et continue de soulever, de nombreuses polémiques. En premier lieu, attirés par une course qui sera mieux payée, les conducteurs des tricycles motorisés vont se diriger vers les zones où ils sont le plus demandés et vont adapter leurs horaires pour être présents au pic des besoins. Et ça marche. En second lieu, les clients qui vont être transportés sont ceux qui valorisent le mieux ce service. Avec un prix constant, le principe du « premier arrivé, premier servi » se serait appliqué pour gérer la rareté.
Les tricycles motorisés détiennent une longueur d’avance sur ses rivaux par sa couverture géographique. Ils dominent partout.
Dans ce business, il est en effet nécessaire de détenir rapidement une part de marché élevée. À défaut, les pousse-pousse ne gagnent plus assez car ils roulent trop souvent à vide, et les clients attendent trop longtemps. Inversement, plus le nombre de clients est élevé, plus les tarifs au kilomètre peuvent être bas car les conducteurs des tricycles motorisés roulent presque toujours à plein.
Mais gagner des parts de marché sur les concurrents passe par des remises et des prix attractifs.
En quelques années, les pousse-pousse ont perdu le contrôle du terrain sinon du marché.
Lorsque vous avez utilisé pour la première fois les services d’un Kavaki vous avez eu l’impression d’entrer dans un autre monde : un conducteur qui vous aide à soulever vos colis, qui est propre et aimablissime. Vous avez peut-être ainsi évité – cela arrive parfois – l’odeur du pousse-pousseur qui dégouline toute la journée, ses jérémiades sur la circulation…
Vous avez peut-être aussi observé que la qualité de service des pousse-pousse, concurrence des tricycles motorisés oblige, s’était grandement améliorée.
A Brazzaville, le nombre de plaintes des clients a décru avec l’essor des tricycles motorisés, notamment les plaintes pour impolitesse.
Un autre bénéfice pour les clients apporté par les tricycles motorisés est d’offrir un service qui s’écarte du centre-ville de Brazzaville et qui offre une plus forte présence la nuit.
Les petits commerçants à Brazzaville ont opté pour faire transporter leurs marchandises par les tricycles motorisés au détriment des pousse-pousse.
Les prix de la course, fixés en fonction de la distance et non du nombre des colis coûte 1000 frs pour ceux des destinations telles que Plateau des 15 ans, marché Talangaï. Quant à ceux qui desservent Bacongo, Petit-chose, Ngamakosso et la Cité des 17, le coût du transport est fixé à 1500 fcfa.
« Depuis que les Kavaki sont arrivés, je n’emprunte plus les pousse-pousse pour transporter mes sacs de foufou. Je préfère ce vélo moteur qui transporte non seulement ma marchandise mais moi-même y compris. Je gagne beaucoup en temps », a témoigné une utilisatrice très ravie.
De leurs côtés, les pousse pousseurs s’alarment à cause du baisse d’activités qu’ils observent depuis l’arrivée de ces vélo-motorisés qui ont tant soit peu révolutionné ce secteur de transport à Brazzaville. « Les marchandises que je transporte ces derniers temps, appartiennent à une catégorie de clientes qui me sont restées fidèles. », a-t-il regretté.
Signalons qu’en dehors des commerçants, les Brazzavillois commencent à utiliser les Kavaki pour effectuer leur déménagement. Les conducteurs de ces motos ne sont pas encore organisés en syndicat. Certains que nous avons abordés dénoncent déjà le harcèlement des agents de la police routière, notamment en ce qui concerne le port du casque de sécurité.
Il n’y a pas d’emploi au Congo pour tout le monde.
Il sied de souligner que ce sont surtout des sans emplois (diplômés sans emploi et autres débrouillards) qui s’offrent ces motos kavaki- à un prix compris entre 600 mille et 1.100.000 FCFA- pour se débrouiller dans le secteur informel comme petits transporteurs de colis et produits agricoles à Brazzaville et sans banlieue.
Jean-Jacques Jarele SIKA / Les Echos du Congo-Brazzaville