RELIGION : La communauté Ngunza Matsouaniste du Congo rend un vibrant hommage à Mfumu Matsoua

Les Ngunza Matsouaniste du Congo-Brazzaville organisent, du 13 au 17 janvier 2024, une semaine dénommée « Vivons ensemble la semaine de Mfumu Matsoua avec pour thème principal : « Chaque jour, créez votre histoire ; dur chaque chemin que vous empruntez, laissez votre histoire ». Plusieurs activités sont programmées dont, la conférence-débat qui s’est déroulée le samedi 13 janvier 2024, au temple Bimoko Kinata, le siège de la communauté, sis rue Nkouka Batéké numéros 12 et 14, à Bacongo Brazzaville. Cette conférence s’est déroulée sous l’autorité du chef spirituel des Ngunza Matsouaniste, le Prophète Massengo Georges Anicet, en présence de l’homme politique et d’Etat, Alain Akouala Atipot, qui a pris une part active aux débats.

En effet, deux thèmes ont été choisis : « Mfumu Matsoua et la liberté », exposé par Kongo Dia Djokolo et « Le tombeau de Mfumu Matsoua : un monde ouvert pour le vivre ensemble », présenté par l’Evangéliste Grégoire Nganga, Secrétaire exécutif, chargé des affaires administratives et juridiques de cette communauté. Enseignant de philosophe de formation.

Dans son exposé, le premier conférencier, Kongo Dia Djokolo a parlé de la liberté dans toute sa substance et sa profondeur. « La liberté est un concept culturel et/ou spirituel. La langue dans laquelle nous parlons, si ce n’est notre propre langue, cela signifie que nous sommes dans la domination, dans l’oppression. Dès lors que la langue dans laquelle nous nous exprimons, nous communiquons n’est pas la nôtre, on n’est point libre. Nous n’avons aucune liberté. Les Français ont un territoire, un espace vitale, la France, une langue de communication, le Français, ce sont donc des Français. Mais nous, n’avons rien de tout cela. Nous sommes dans la servitude, la soumission », a-t-il déclaré.

Selon lui, André Grenard Matsoua, fît des études, fût même catéchiste catholique puis effectua des voyages en Europe, en France particulièrement. Il a combattu pendant la Grande Guerre, comme ’’Tirailleur Sénégalais’’. En effet, ni l’association Amicale qu’il créa en 1926 à Paris, ni le Mouvement Mikalé qui naquit le 31 décembre 1937, à Boukondzo-boua-lami, aujourd’hui dans le district de Kinkala dans l’actuel département du Pool, ne firent jamais qu’il fût en odeur de sainteté à l’égard des colons. Au contraire ces mouvements véhiculant, entre autres, des idées humanistes humanitaires d’une part, et d’émancipation de l’homme noir d’autre part, furent jugés par l’administration coloniale comme des provocations inacceptables. Dans doute les colons français avaient-ils compris qu’à travers ces mouvements, se mettait en place toute une synergie permettant la continuité de la lutte de libération des peuples sous occupation et exploitation étrangères ?

« Il convient de rendre à Matsoua la place qu’il mérite dans notre histoire. Qui dans notre pays ne croit pas qu’il fut l’un des pionniers de la lutte anti-colonialiste, de la lutte de libération de l’Afrique à l’époque de l’impérialisme. On oublie souvent de situer la pensée et l’action de de Matsoua dans son contexte historique. Donc, si les colonialistes français se sont acharnés contre lui avec autant de sévérité, c’est qu’il représentait un réel danger. Il faut donc reconstituer la vie militante de Matsoua et la proposer aux combattants d’aujourd’hui et de demain», a réclamé Kongo Dia Djokolo renchéri le conférencier.

« Aussi, André Matsoua a-t-il combattu le Code de l’indigénat, la dictature et la corruption. Pourtant, les colons français d’alors ont présenté Matsoua comme un personnage perturbateur, réfractaire à toute hiérarchie et qui plus est un bandit comme l’ont été ses prédécesseurs : Mabiala-Ma-Nganga ; Bouéta-Mbongo et un peu plus avant eux, Kimpa-Mvita, dans le Royaume Kongo. Pour cause, certain de ses braves compagnons de lutte furent d’ailleurs exécutés sommairement par le colonisateurs français, j’ai cité : Mbiémo ; Milongo et Mbemba », a rappelé le conférencier.

En conséquence, Kongo Dia Djokolo exhorte les peuples africains, les ex-colonisés, de s’approprier avec courage et abnégation, fièrementleur langue, de leur culture et de leur côté spirituel pour obtenir une vraie autonomie vis-à-vis de ceux qui ne cessent de nous imposer leur ’’civilisation’’, leur ’’culture’’ ; leur ’’religion’’, grosso modo, leurs diktats sur tous les plans.

Le deuxième exposant, l’Evangéliste Grégoire Nganga a éclairé le public sur la symbolique du tombeau de Mfumu Matsoua, qui est un monde ouvert pour le vivre ensemble. Dans cette thématique, l’exposant établit une relation entre le cœur de Mfumu Matsoua, qui prônait les valeurs cardinales de l’humanité : la liberté, la justice, l’égalité et le vivre ensemble.

« L’enseignement de Matsoua ayant plusieurs facettes, ressemble à l’éléphant dans un village des aveugles. Celui qui a touché l’oreille, pense que l’éléphant ressemble à une feuille vierge ; celui qui a touché la trompe, l’assimilera à un serpent ; celui qui a touché la patte, pense que le pachyderme est un tronc d’arbre. Et tout le monde a une idée différente de ce mastodonte de la forêt. Telle est la présentation du Messie. On ne peut jamais faire des parallèles à son égard. On ne pourra comprendre Matsoua, parce que, à multiple facettes», a-t-il expliqué.

Ainsi donc, quand vous lisez le procès de Matsoua, l’homme politique peut se retrouver, pour former le panafricanisme ; le juriste, mêmement, pour parler Droit de l’homme. Donc, chacun peut se retrouver parce que, c’est un vidage multidimensionnel, un personnage exceptionnel.

«Le mystère sur Matsoua doit demeurer. Nous voulons avoir sur cette terre, des hommes et des femmes, des jeunes gens et des enfants, avec des idéaux novateurs, parce que l’humanité se porte mal. Les antivaleurs qui supplantent actuellement la morale doivent être éradiquées à jamais, pour un vivre ensemble plus plausible de génération en génération », a évoqué l’orateur, l’Evangéliste Grégoire Nganga.

Dans son mot de remerciement aux invités, aux journalistes et à l’assemblée, clôturant la première journée dédiée à Mfumu Matsoua, le chef spirituel, le prophète Anicet Massengo a, salué l’initiative, la dextérité et le savoir-faire des conférenciers. Il a en outre rappelé le matricule 22 que portait André Grenard Matsoua sur le col de son uniforme. Comme par hasard ou simple coïncidence, 22 est une véritable symbolique. En effet, 22 représente l’article 22 de la déclaration universelle des droits de l’homme, qui stipule : « Toute personne, en tant que membre de la société, a droit à la sécurité sociale. Elle est fondée à obtenir la satisfaction des droits économiques, sociaux et culturels indispensables à sa dignité et au libre développement, grâce à l’effort national et à la coopération internationale, compte tenu de l’organisation des ressources se chaque pays », a-t-il précisé.

Les activités commémoratives se poursuivent avec l’exposition de divers objets réalisés par les adeptes et l’animation culturelle.

La semaine sera bouclée par le culte spécial du 17 janvier à 13 heures au Palais des Congrès de Brazzaville.

VALDA SAINT-VAL / Les Echos du Congo-Brazzaville