Le Président du Conseil supérieur de la liberté de communication (CSLC), Philippe Mvouo, a déploré vendredi 9 mai à Brazzaville, l’attitude des journalistes qui ne s’investissent pas à travers leurs contenus pour informer sur ce fonds qui contribuera au fonctionnement des médias, tant publics que privés.
Philippe Mvouo a fait cette déclaration lors de la célébration différée de la Journée mondiale de la liberté de la presse, célébrée cette année sous le thème « Informer dans un monde complexe – l’impact de l’intelligence artificielle sur la liberté de la presse et des médias ».
« La Redevance audiovisuelle n’existe plus. Elle est remplacée par le Fonds d’appui aux organes de presse. Malheureusement, je ne vous entends pas en parler. Quels journalistes êtes-vous donc ? Vous n’écrivez pas, vous ne communiquez pas sur ce sujet », s’est interrogé le Président du CSLC.
A propos de la gestion de ce fonds, le Président du CSLC a expliqué que la loi confère au Conseil l’autorité de gérer toute forme d’aide aux médias.
« Par conséquent, je me rapprocherai du Premier ministre, car nous devons mettre en place une commission spécifique », a-t-il précisé.
Cette commission inclura les représentants des syndicats et des autres organisations professionnelles, notamment Journaliste Éthique Congo (JEC) et l’Union des professionnels de la presse du Congo (UPPC). S’y ajouteront également un représentant de l’Association des consommateurs, un représentant du ministère de la Communication, un représentant de la Primature, ainsi que le Conseil lui-même. Le président du Conseil ne siégera pas au sein de cette commission, a-t-il tenu à préciser.
Philippe Mvouo a souligné que son rôle se limitera uniquement à prendre connaissance du contenu des rapports. C’est cette commission qui définira les critères d’éligibilité des médias censés bénéficier de l’appui financier dudit fonds.
« Si vous remplissez les critères, d’accord. Si vous ne les remplissez pas, n’espérez rien, n’attendez rien », a-t-il ajouté.
Récemment, l’ONG Journalisme et Ethique Congo (JEC) a émis le vœu au gouvernement congolais d’octroyer des subventions et des subsides aux médias locaux, pour leur permettre d'exercer le métier en toute liberté.
« C’est vrai, sans argent, il n’y a pas d’entreprise de presse. Dans un pays où le marché de la publicité est très étroit et orienté, bien évidemment, les médias tant que publics que privés ne peuvent survivre. La Redevance audiovisuelle, la RAV, qui a fait l’objet de tant de discours officiels, de réclamation des médias, n’a jamais été reversée depuis 22 ans », selon la déclaration de l’ONG Journalisme et Ethique Congo.
Au regard de la loi des finances 2025, cette RAV est désormais supprimée. Elle est néanmoins remplacée par le Fonds d’Appui aux organes de presse. Ce qui pourrait changer ici, c’est la clé de répartition de ce fonds, élargi à tous les organes de presse de notre pays.
Au Congo-Brazzaville, le budget de l'Etat avait prévu en janvier 2023 un Fonds de la Redevance Audiovisuelle (R.A.V) Financement des organes de presse qui s'élève à 150 millions de FCFA.
Depuis là, aucun média public ou privé n’a touché un radis.
Comment a été évalué ce Fonds qui ne prévoit que la somme de150 millions de FCFA pour 2023 ? Cette somme constitue donc la part de l'Etat ? Qu'en est-il du prélèvement de la RAV à partir des factures de la société d'électricité ? N’est-il pas possible que le Gouvernement congolais fasse un point sur la masse d'argent de ce Fonds chaque année ?
Au regard du nombre d'abonnés de la société d'électricité pour tout le Congo, à raison de 500Fcfa le mois soit 1000Fcfa tous les deux mois, c'est tout de même un sérieux pactole pour aider la presse et cette somme dépasse largement les 150 millions figurant dans le budget 2023.
La pluralité des médias congolais est inégalement répartie sur le territoire national. Brazzaville enregistre la plus forte concentration, suivi de Pointe-Noire.
La multiplicité des médias au Congo, cinquante et une chaînes de radiodiffusions, quinze télévisions, cinq télédistributeurs, douze journaux et dix médias en ligne, cache plusieurs défis qui se posent à la plupart d’entre eux, en particulier ceux relatifs à leur viabilité.
La faiblesse économique des médias contribue, dans une proportion non négligeable, à la fragilisation de leur autonomie et de leur indépendance éditoriale, avec une incidence certaine tant sur la qualité des contenus que sur les conditions de travail.
Au Congo-Brazzaville, les médias supportent encore d’importantes charges pour la production, l’exploitation et la distribution.
Non loin de chez nous, le Gabon dispose par exemple de quelques outils d’aide à la presse, notamment le Fonds national pour le développement de la presse doté d’une enveloppe de 2 milliards de Francs CFA. Cette aide à la presse a été multipliée par 4. L’enveloppe est passée de 500 millions à 2 milliards de Fcfa. L’aide ne se limite plus seulement aux journaux et à la presse en ligne. Désormais, y ont également droit les médias audiovisuels et les agences d’information.
Le principal critère de répartition de l’aide reste la régularité de parution.
Il faut signaler qu’avec zéro journaliste en prison ou assassiné, le Congo connait quelques avancées dans les grandes batailles en termes de liberté de presse. Mais son classement RSF (Reporter Sans Frontière) passe de 69e à 71e position.
Jean-Jacques Jarele SIKA / Les Echos du Congo-Brazzaville
Photos : DR