Qualifiée de " crime pharmaceutique " par Interpol, Brazzaville insiste et persiste dans la vente de médicaments dans les rues

Brazzaville souffre d’une maladie qui ne cesse de se propager à vitesse grand V, celle du commerce des faux médicaments qui polluent toutes les rues et tous les marchés de la capitale congolaise. Ce commerce illégal, où médicaments, cosmétiques, produits diététiques sont vendus à l’air libre en dehors de tout cadre légal, peut être considéré comme un "crime contre l'humanité", exposant des milliers de consommateurs congolais.

Il serait important de rappeler qu’au Congo-Brazzaville, les autorités compétentes, notamment le Ministère de la Santé et de la population fournit des efforts considérables afin d’éradiquer ce phénomène. Mais ce travail de longue haleine ne peut s’effectuer de manière isolée.

Depuis longtemps, le gouvernement ne cesse de mener des actions sur la sensibilisation des populations sur les dangers de ces médicaments contrefaits. Il a même mis en place depuis plusieurs années une commission d’homologation des médicaments et un système de pharmacovigilance, et procédé au renforcement de l’autorité nationale de réglementation pharmaceutique.

Les populations quant à elles devraient pouvoir prendre conscience des dangers qu’ils courent en consommant de tels produits.

Ils sont vendus sans prescription médicale, aucune posologie n’est fournie, pire encore on ignore les effets secondaires.

Un tel danger pour les populations les plus vulnérables mérite une attention particulière de la part des autorités afin de prendre des mesures drastiques.

Beaucoup des congolais interrogés par Les Echos du Congo-Brazzaville, pensent souvent à tort que les médicaments vendus en pharmacie coûteraient trop chers et nécessitent une ordonnance qui à son tour implique une consultation au préalable chez un médecin.

Faute de moyens, ils se limitent aux médicaments de la rue. Or il existe en pharmacie des médicaments standards qui ne nécessitent pas d’ordonnance, affirme Emeraude, vendeuse dans une pharmacie au centre-ville de Brazzaville. Ce sont entre autres des médicaments contre la fièvre, déparasitant, antidouleurs, etc.

Le long des principales artères de Brazzaville, ou encore au marché Total au nord de la capitale politique congolaise, plusieurs étalages de médicaments dits “de la rue” ont été érigés à la merci de la poussière, des intempéries et du soleil.

Mais d'où viennent ces médicaments de rue ? Pourquoi ce phénomène s'amplifie-t-il et quelles en sont les conséquences ?

L'émergence et la propagation du trafic des médicaments de rue au Congo-Brazzaville trouvent leurs racines dans un contexte marqué par la faible volonté des décideurs politiques et l'ignorance des consommateurs.

La précarité de la couverture sanitaire et le coût élevé des médicaments ont alimenté la croissance rapide de ce commerce illicite.

Au Congo-Brazzaville où l'accès aux soins est limité, les médicaments de la rue sont perçus comme une solution pratique.

La misère, le chômage et l'abandon scolaire des jeunes fournissent une main-d'œuvre pour ce marché clandestin.

De plus, l'absence de réglementation, la corruption douanière et le laxisme des autorités favorisent l'expansion du trafic.

La vente de médicaments dans les rues de Brazzaville a des conséquences sanitaires, sociales et économiques dévastatrices.

Sur le plan sanitaire, l'absence de contrôle réglementaire expose les consommateurs à des produits contrefaits, inefficaces, voire dangereux qui aggravent les problèmes de santé au lieu de les résoudre.

Sur le plan social, cette pratique alimente la marginalisation des populations vulnérables qui se tournent vers des solutions informelles et potentiellement néfastes.

Sur le plan économique, le trafic de médicaments représente une perte significative de la part du marché des pharmacies agréées. Cette pratique prive également le gouvernement congolais des recettes fiscales dont il a besoin pour renforcer les systèmes de santé.

En conclusion, la vente de médicaments dans les rues de Brazzaville est un fléau qui menace la santé publique et entrave le développement économique.

Seule une stratégie globale impliquant la répression des trafics, l'éducation des populations et l'amélioration de l'accès aux soins peut mettre fin à ce commerce illicite aux conséquences dramatiques.

Cependant, chacun d'entre nous peut agir à son niveau en boycottant ces trafiquants, et en ne s'approvisionnant qu'auprès de fournisseurs agréés.

Et selon l'OMS, les médicaments antipaludiques falsifiés causent à eux seuls près de 200 000 décès par an.

Jean-Jacques Jarele SIKA / Les Echos du Congo-Brazzaville