Congo – Département du Pool : Le gouvernement tient parole pour une réelle sortie crise

Nulle dynamique de paix ne peut prendre corps, si les signaux qui la sous-tendent ne sont pas conséquents. Dans la résolution de la crise du Pool, l'armée congolaise vient de poser un acte de grande portée.

Même si elles ne le clament pas, les Forces Armées Congolaises ont fait un pas conséquent, vers la sortie de crise dans le département du Pool, avec l'injonction faite par le chef d'état-major général des armées, de lever tous les barrages qui y avaient été dressés. En d'autres termes, cela signe de facto le retrait de la troupe combattante du théâtre des opérations.

Lorsque, clôturant une session de l’Assemblée nationale, son président Isidore Mvouba affirmait que le président Denis Sassou-Nguesso avait accédé à la demande des élus du peuple d’instaurer une plateforme d’échanges et de dialogue sur le Pool, il ne s'agissait ni plus ni moins que d'une volonté manifeste de se sublimer face à la douleur des populations du Pool, et de tenter une solution autre que celle des armes qui depuis plus d'un an déjà, ne sont pas venues à bout du pasteur Ntumi et de ses combattants ninjas.

Depuis, d'autres initiatives ont vu le jour, la plus expressive étant la rencontre du 3 octobre 2017. À l’initiative des sages et notables du département du Pool, le président Denis Sassou N’Guesso avait eu une séance de travail avec leurs représentants à Brazzaville. Les échanges  avaient porté sur l'étude des voies et moyens du rétablissement de la paix et de la sécurité dans ledit département.

Ce jour là, le président de la république prenait entre autres décisions, le ferme engagement de créer des conditions pour la sortie des forêts des ninjas.

Avec la décision prise par le chef d'état-major des armées congolaises, il y a de quoi dire que contrairement aux discours martiaux auxquels on était habitué il y a quelques mois, la recherche de la paix dans le Pool par la voie du dialogue et de la conciliation semble désormais prendre place auprès des Forces en belligérance. Cette volonté unanimement saluée, ne peut s'enclencher qu'à la condition que déjà, les armes se taisent.

Les grands théoriciens de la guerre ou de la diplomatie s'accordent à dire que « la paix par les armes est une guerre en sursis ». De ce point de vue, discutable en rares égards, il se dégage tout de même le net constat que « la guerre ne règle rien. Elle ne fait qu'aggraver l'état des déséquilibres qui conduisent à la guerre, en creusant de plus en plus les schismes de la division et en installant pour bien longtemps, la haine et le sentiment de vengeance, dans les cœurs des vaincus. »

Quand un conflit intra-national s'éternise, les dommages collatéraux, du fait de leur multiplicité, deviennent assimilables à des faits de guerre, pour ceux qui en sont victimes. Le doute s'installe dans les esprits et la neutralité, même des forces gouvernementales devient sujette à caution, auprès des populations en qui naît le « syndrome de Stockholm », alimenté par les accointances géographiques, ethniques ou tribales.

Cette dimension sociale a fait qu'en Colombie par exemple, le conflit entre le gouvernement et les Farc s'est éternisé des décennies durant. Seul le dialogue a conduit à la paix.

Plus le conflit s'étend dans la durée, plus on perd de vue la raison première qui l'a déclenché. Bavures et cruauté s'installent, du fait que l'on voit mourir ses frères d'armes. Même l'armée la plus disciplinée du monde ne peut y faire face, à défaut d'envoyer des unités entières en cour martiale. Plus personne ne peux dire, qui a tort, qui a raison, car les différentes péripéties au cours des opérations ont engendré dans les parties en belligérance, des faits répréhensibles, susceptibles d'être condamnés. Alors, qui condamner et qui absoudre ?

Ce n'est point une faiblesse pour les officiels congolais, que d'initier le dialogue pour résoudre la crise du Pool, ainsi que le claironnent certaines voix.

Chaque jour, des gens meurent dans le Pool. Du fait des armes, ou des conséquences des faits d'armes. Puissent ceux qui claironnent convenir avec le proverbe Peul : « seul le poulet ajourné de l'abattoir connaît l'agonie du couteau ». Ce poulet a vu mourir les siens et accepterait tout compromis qui lui épargnerait le supplice. Pour les autres, qui épiloguent à propos, cela relève de l'imaginaire.

La décision de se sublimer, prise par le président Denis Sassou N'Guesso, acceptée, quoique assortie de conditions par le pasteur Ntoumi, participe d'un acte de courage.

Le courage disait Jules Ferry, « ce n'est pas de laisser aux mains de la force, la solution des conflits que la raison peut résoudre. » Il en faut, une sacrée dose de courage, quand on sait que le conflit a produit un bilan humain et sociologique que nul ne pourra réparer.

La levée des barrages et autres checkpoints préfigure cet état de non-guerre qui permettra aux populations meurtries, innocemment prises en otages par les forces belligérantes, à avoir enfin le « droit à la vie, à la liberté et à la recherche du bonheur ».

D'autres part, la paix véritable participe de ce que les détenteurs inappropriés des armes de guerre retrouvent en les déposant, une reconversion socio-économique qui s'inscrit dans l'optique de la paix. Cette tache, Denis Sassou N'Guesso l'a confiée à Euloge Landry Kolelas.

Bertrand BOUKAKA/Les Échos du Congo-Brazzaville