Congo – Santé publique : De plus en plus de grandes villes exposées aux chiques

Le phénomène se remarquait naguère dans les villages. Désormais, il a cours dans les grands centres urbains où on note une prolifération des chiques au point que cela devient presque endémique, même si jamais, les services d’hygiène ou de santé n’en mèneront des campagnes de prévention ni n’en dresseront des statistiques pour évaluer l’étendue de la menace qui est plutôt classée comme une nuisance, qu’une maladie.

La ‘’tungose’’ ou plutôt ‘’ntunga’’ ou ‘’mayanzi’’ dans la terminologie congolaise, est une menace sournoise qui pourtant incommode. À Brazzaville et Pointe-Noire, notamment dans les quartiers périphériques, il est fait de plus en plus état de cas de chiques surtout chez les enfants et adolescents qui en cette période de saison sèche ont pour entre autre activités, que celle de jouer à même le sol, les pieds nus.

Tunga penetrans, ou Sarcopsylla penetrans est une espèce de petites puces tropicales, plus connue sous le nom vulgaire de « puce chique ». La pénétration dans l'épiderme humain de femelles fécondées de Tunga penetrans provoque la tungose, ou sarcopsyllose, car seule la femelle pénètre dans la peau des pieds, à l’intérieur de laquelle elle élabore ses œufs (étuve naturelle).

La pénétration cutanée passe le plus souvent inaperçue et, en 4 à 5 jours, la puce se gorge de sang, son abdomen rempli d’œufs se distend, produisant de ce fait une tension, responsable d’une symptomatologie douloureuse. Les œufs sont ensuite expulsés sur le sol et deviennent des larves, puis des puces en un cycle d’une quinzaine de jours. L’homme, hôte habituel, ainsi que des animaux, en particulier les porcs, sont contaminés par contact direct de la peau avec le parasite.

Même si la présence de chique dans la peau n’est pas bien méchante, au plan sanitaire, (cette présence se manifestant par une douleur modérée et même de douces démangeaisons berçantes), il n’en demeure pas moins que les conséquences peuvent être bien plus graves, chez des personnes prédisposées à certaines pathologies de la peau, ou très sensibles au lésions cutanées, les diabétiques par exemple. Il peut apparaitre une surinfection, voire des cas de tétanos, si les matériaux d’extraction du ‘’mayanzi’’ ne répondent pas aux règles d’asepsie. Les complications, panaris, abcès, sont dues au fait que l’extirpation n’est pas suivie de l’application d’un antiseptique. Il est conseillé pour éviter ces désagréments de ne pas se promener nu-pieds dans les terrains sablonneux car la marche pieds nus ou sans chaussettes favorise la contamination.

Ce sont surtout ces complications qui débouchent sur d’autres pathologies qui devraient pousser les pouvoirs publics à s’intéresser au problème qui devient à l’évidence, un phénomène de santé publique, en dehors des aspects esthétiques, des orteils déformés, voire de pieds palmés.

D’autre part, si les adultes qui jouissent des conditions d’hygiènes quasi permanentes sont moins exposés aux chiques, les enfants par contre devraient bénéficier de davantage d’attention de la part des parents qui en ces temps de vacances, relâchent quelque peu l’hygiène, au point que les enfants s’endorment parfois s’en s’être lavés au préalables, permettant ainsi aux puces qui se sont logées dans les orteils, de pénétrer sous la peau dans la nuit.

Même s’il n’existe pas à l’état médicamenteux, le traitement consiste dans la forme simple en l’extraction de manière aseptique et non sanglante du parasite dans son intégrité sans le léser avec un vaccinostyle ou une aiguille bien souvent en tige de bambou. Après désinfection locale, on récline l’orifice cutané. Détruire ensuite les chiques extraites au moyens du feu, car le contact de celles-ci avec le sol démultiplie les larves, provoquant à l’évidence une prolifération.

Ainsi, la prophylaxie repose donc sur le port de chaussures fermées et de chaussettes dans les zones exposées et sur une bonne hygiène corporelle des pieds. À défaut d’un bain, se laver surtout les pieds le soir au coucher et vérifier si une puce ne tente pas de s’incruster sous la peau.

Bertrand BOUKAKA/Les Échos du Congo-Brazzaville