Congo – Sécurité présidentielle : Denis Sassou N'Guesso serait-il en danger de mort ?

Le mois de décembre a été marqué au Congo, entre autres faits, par la mise à nu par les services de renseignement congolais d'une tentative de coup-d'état, dont le général Norbert Dabira serait le cerveau. Selon notre confrère le Troubadour dans sa parution n°122 du 21 décembre, cette affaire aurait mis en évidence des failles manifestes créées dans l'appareil sécuritaire du président congolais.

Avec maints détails tirés à l'évidence des procès verbaux d'auditions, le Troubabour, par la plume d'Anicet Samba livre un récit glaçant sur la tentative de coup-d'état, dont le but était l'élimination physique du président Denis Sassou N'Guesso, en faisant exploser son avion en plein vol.

Extraits :

« Lorsque le général Norbert Dabira franchit le seuil de la direction générale de la surveillance du territoire (DGST) ce matin du 7 décembre 2017, il ne sait pas vraiment s’il va repartir chez lui. Prévoyant, avant de quitter son domicile, il avait pris soin de souffler à ses proches d’ébruiter cette convocation. C’est que l’homme se doutait bien de quelque-chose. Mais il était loin de penser qu’il avait commis une grosse «bourde» en approchant le général Nianga Mbouala Ngatsé pour le mettre au courant d’un projet visant à «neutraliser» le président de la République, Denis Sassou-N’Guesso. Mais, peu après, lorsqu’on lui fait écouter dans les locaux de la DGST sa conversation téléphonique avec le Commandant de la Garde républicaine, il réalise alors l’étendue de sa méprise et manque de peu de s’écrouler tant qu’il est confondu au plus haut point. Sur le moment, il regrette d’avoir fait confiance en cet officier général dont il pensait qu’il n’était plus en odeur de sainteté avec le président de la République depuis l’incarcération de ses deux cousins, Okandzé Okourou Jean Stéphane et Okandzé Okourou Elie, le second ayant été son directeur de cabinet. »

Selon le Troubadour, la méprise du général Dabira d'associer le général Nianga Ngatsé Mbouala à son projet, serait due au fait qu'il le croyait en rupture de banc avec le président de la république, depuis la prétendue affaire de son accointance avec le pasteur Ntoumi.

Et de poursuivre :

« Convaincu certainement que cette affaire avait fini par jeter un coup de froid entre le président de la République et son commandant de la Garde républicaine, le général Norbert Dabira aurait décidé de se rapprocher de ce dernier.

À l’occasion d’un premier contact, l’ancien haut-commissaire à la réinsertion des ex-combattants aurait dépeint la situation économique et sociale que traverse le Congo. Il lui aurait confié qu’à l’allure où allaient les choses, eux qui étaient au pouvoir risquaient de tout perdre à la suite d’une explosion sociale. Il lui aurait alors fait une proposition, vue sa proximité avec le président de la République.

D’après les premiers éléments de l’enquête, le général Norbert Dabira aurait suggéré l’élimination physique du président de la République. À cette proposition, le général Nianga Mbouala Ngatsé aurait répondu qu’il valait mieux le déposer et l’assigner à résidence à Oyo, son village natal. Mais le général Norbert Dabira aurait rétorqué en ces termes: «Denis Sassou-N’Guesso est un grand guerrier. Il peut se retourner contre nous, même retiré dans son village natal». C’est alors que le Commandant de la Garde républicaine aurait demandé à son interlocuteur ce qu’il fallait faire en définitive. Norbert Dabira aurait alors fait cette proposition extrême à son interlocuteur : faire exploser l’avion présidentiel en plein vol.

C’est sur cette entente que les deux hauts officiers se seraient séparés.

Norbert Dabira devait quelques jours plus tard se rendre à Paris. Mais, avant de voyager, il aurait fait parvenir au général Nianga Mbouala Ngatsé un téléphone avec une puce d’un opérateur de téléphonie mobile de la République Démocratique du Congo, en lui recommandant de ne jamais l’appeler par un numéro de Brazzaville. Mais il ressort dans les premiers éléments de l’enquête que le général Nianga Mbouala Ngatsé aurait malgré tout appelé son «complice» à Paris par un numéro de Brazzaville. »

C'est une communication téléphonique échangée par les généraux Dabira et Nianga Mbouala qui aurait confondu le général Dabira. Le Troubadour raconte la scène dans ses moindres détails. « Lorsqu’on lui fait écouter dans les locaux de la DGST sa conversation téléphonique avec le Commandant de la Garde républicaine, il réalise alors l’étendue de sa méprise et manque de peu de s’écrouler tant qu’il est confondu au plus haut point. »

Le général Dabira, cerveau présumé du complot visant l'élimination du président Denis Sassou N'Guesso

« Devant l’évidence des enregistrements téléphoniques, le général Norbert Dabira n’aurait pas eu de grands arguments de défense.

S’il n’a pas été gardé à la DGST, l’ancien haut-commissaire à la réinsertion des ex-combattants ne peut plus sortir de Brazzaville jusqu’à la fin de l’enquête, son passeport lui étant retiré.

Aujourd’hui, les enquêteurs cherchent les éventuels complices du général Norbert Dabira aussi bien à l’intérieur qu’à l’extérieur du pays. On dit qu’il aurait eu de nombreux contacts en Europe, notamment avec des marchands d’armes.

D’autres interrogatoires pourraient avoir lieu et même une confrontation entre les deux généraux."

Selon notre confrère le Troubadour, des officiers et sous officiers voire des hommes de rangs de la garde et sécurité présidentielles seraient compromis dans cette affaire dont l'enquête suit son cours. D'où l'analyse qu'il en dégage :

« Ce projet de complot a déjà installé un véritable malaise au cœur du pouvoir. La programmation de l’assassinat de Denis Sassou N’Guesso (lequel apparaît comme le point d’équilibre de la paix, de la sécurité et de la stabilité dans le pays) par des proches, ne pouvait laisser que ce sentiment. Cette conspiration peut laisser supposer aujourd’hui, s’agissant du pouvoir, que le ver serait dans le fruit.

Avant même l’aboutissement de l’enquête, cette conspiration présumée a introduit la méfiance et la suspicion dans les rouages du pouvoir. Ajouté à la grave crise économique et financière que connaît le pays, ce complot, s’il est avéré, devrait nécessiter, en toute logique, une recomposition des forces au sein du pouvoir. »

Notes de lecture de Bertrand BOUKAKA/Les Échos du Congo-Brazzaville