Les populations de Mayoko embarrassées par une présence chinoise devenue étouffante

La montée en puissance de la Chine en matière économique au Congo-Brazzaville ne fait pas que des heureux. Loin de là. La colère gronde à Mayoko dans le département du Niari (sud) où l’image de Pékin s’est considérablement dégradée. Les scandales se sont multipliés à travers le pays impliquant des Chinois dans des opérations irrégulières, voire mafieuses. Désormais, les entreprises chinoises, bien présentes sur le terrain, font comme tout le monde pour se remplir les poches. Braconnage des espèces menacées, prédations sur les ressources minières, trafic de bois précieux... Tous les coups sont permis.

Des groupes criminels et mafieux chinois très structurés font des affaires juteuses, en exploitant ces ressources pour le marché chinois. Les contrebandiers se régalent.

Les populations de Mayoko ont fini par réaliser que "le partenariat gagnant-gagnant", tant vanté par la Chine, n’est qu’un marché de dupes.

Tous les pays de Mayoko veulent protéger leur environnement  des prédateurs et surtout la rivière Louetsi, leur bien commun.

En janvier 2019, les populations de Kellé, dans le département de la Cuvette-Ouest, avaient effectué une descente sur zone exploitée par la société Agil qui continuait d’extraire l’or sur les sites contestés, au grand dam des populations qui, afin d’obtenir la cessation d’activités.

Écosystème dévasté, nappe phréatique polluée par des rejets cyanurés dont le contact avec la peau provoque des dommages sur celle-ci, le tableau dressé par les populations avait été conforté par la descente de la ministre du Tourisme et de l’environnement, Arlette Soudan Nonault, qui après avoir constaté, les dégâts orchestrés par la société Agil dans les villages de la sous-préfecture de Kellé, avait pris la décision qui s’imposait.

Pourtant, depuis lors, la société chinoise a fait fi de la décision gouvernementale et refusé de quitter la forêt de Kellé où elle a continué ses activités, comme si les récriminations à son endroit n’étaient pas des plus graves.

Excédés, les populations n’ont trouvé d’autre solution que de contraindre les agents d’Agil de dégager leurs engins et de libérer la zone. À bord de leurs scooters « Djakarta », ils ont rallié les sites d’extraction pour faire cesser les activités.

Au village Nguingoli, à 29 km de Kellé, la population a perdu sa source d’eau (la denrée est souillée), le bois y compris. Il en est de même pour les sites d’Andoubi, au village Akamou (31 km de Kellé).

Cent cinquante ruisseaux environ sur trente-six sites ont été abîmés. Les habitants n’ont plus d’eau ni pour boire ni pour se laver. Le contact de ces eaux avec le corps provoque d’intenses démangeaisons et on se gratte jusqu’à s’arracher la peau, d’où le vocable « Nkwaka Nzoka ».

Le site d’Andoubi 2 est, quant à lui, détruit entièrement et abandonné au mépris des lois de la République.

Longomba, un autre site au village Otsouadzoko, à 40 km de Kellé, est le plus grand chantier qui a connu une vaste destruction.

La colère des populations de Mayoko est partie du fait que dans sa recherche de l’or, les chinois détruisent tout sur leur passage comme dans la Cuvette-Ouest, dans la Bouenza et dans le Kouilou.

Nombreux ont décidé de faire recours au ‘’Ndzobi’’, un fétiche redouté dans la contrée.

Selon certains ‘’grands prêtres du Ndzobi’’, ainsi placé au bord de la rivière Louetsi, ces fétiches ''esprit de la pierre'' et donc des matières premières, pourrait empêcher le bon fonctionnement de l’entreprise chinoise à travers ses esprits libérés, en rendant rare sinon inexistant l’or, le coltan...

Le Ndzobi est exclusivement pratiqué par les groupes ethniques Bambamba, Kota, Ndassa Nzabi, Obamba, Téké et Wandji, concentrés au sud-est du Congo et au Gabon.

Le Ndzobi est très fonctionnel et normatif. Son activité concerne autant la socialisation, la lutte contre la sorcellerie, le contrôle social que le règlement des conflits, l'activité économique, les relations entre les hommes.

L'originalité du Ndzobi réside dans son ambivalence : il est à la fois dangereux et salutaire, voire ésotérique. Malgré sa multifonctionnalité et son efficacité affirmée, sa perception est très contrastée dans l'opinion publique. Il est, pour certains, une association de sorciers; et une société initiatique pour d'autres.

Quoi qu’il en soit, relevant du domaine magico-religieux le recours au Ndzobi est toujours réputé dangereux, pour ceux contre qui il est dirigé.

Un typhon qui ravagerait, sans pitié et remords, la bicoque et moyen roulant avec décès ou disparition inopiné des chinois.

Entre-temps, pour les chinois « croire ou ne pas croire » au Ndzobi, là est toute la question pour un fétiche qui une fois libéré, conduirait parfois jusqu'à la mort des personnes ciblées.

Les chinois présents à Mayoko sont  donc avertis.

Qui vivra, verra !

Jean-Jacques DOUNDA / Les Echos du Congo-Brazzaville