Congo – Climat : Encore une catastrophe à Saint Pierre Claver de Bacongo

Un vent violent a traversé la ville de Brazzaville dimanche, causant des nombreux dégâts, notamment à la paroisse Saint Pierre Claver de Bacongo où plusieurs véhicules ont été endommagés du fait de la chute des arbres. De plus en plus, la capitale congolaise est soumise aux violentes intempéries. Entre changements climatiques et volonté divine, comme savent la déceler les congolais, l’action de l’homme n’est peut-être pas étrangère à ces catastrophes.

La paroisse Saint Pierre Claver de Bacongo a essuyé une autre catastrophe dimanche en milieu de matinée. Alors qu’ils assistaient à la messe dominicale, de nombreux paroissiens qui avaient stationné leurs voitures dans la concession de la paroisse ont eu la surprise de les retrouver coincées sous les arbres, vitres éclatées, carrosserie froissée.

Un vent violent a déraciné ou cassé les arbres qui dans leur chute, ont endommagé les véhicules. On ne déplore aucune perte en vie humaine, mais les dégâts matériels sont importants.

En d’autres endroit de la ville, l’effet du vent a déraciné des arbres qui dans leur chute, ont couché des poteaux électriques, avec parfois des câbles sous tension sectionnés et trainant ça et là à même le sol, avec un risque d’électrocution patent pour les passants.

Si certains penchent pour la fatalité, d’autres évoquent les effets des changements climatiques.

« Changements climatiques », ces mots sont désormais courants dans le langage des congolais, à travers les effets indus du climat dont ils subissent les contrecoups environnementaux, s'accommodant ainsi avec des réalités quasiment sans repères en termes de comparaison, pour de nombreux contemporains. Entre un ensoleillement qui part du point du jour jusqu'au coucher du soleil, générant une chaleur torride, les pluies diluviennes à l'indice d'eau toujours plus élevé et les érosions qui s'en suivent, il y a de quoi y voir un acharnement de la nature.

Pourtant, avec le recul, on peut convenir que cette furie de la nature a été provoquée par l'homme à travers deux causes principales : l'absence de plan d'urbanisme et la destruction de l'environnement aux fins d'une urbanisation non maîtrisée.

Jusque dans les années 80, la géographie de Brazzaville était faite de blocs résidentiels, d'un réseau hydrographique et d'un couvert végétal savamment repartis à travers les différents quartiers de la ville, au point qu'il se créaient sur celle-ci des microclimats qui régulaient la température de l'air ambiant.

Des minis lacs comme ‘’l’amour de l’eau’’ou ‘’la blede’’, les rivières Tsiémé, Madoukoutiékélé, la Mfoa, Mfilou, la kata-kata, et le Djoué irriguaient des petites forêts-galeries qui jouaient un rôle de régulateur thermique, en supplément de la forêt de la « Patte d'oie », s'étendant du Parc zoologique, le Boulevard des Armées, Alfred Raoul, jusqu'à Maya-Maya, englobant la zone du « jardin d’Essais », jusqu'à l'Orstom.

La peuplade de bois de fer et autres acacias qui couvraient le secteur de l'OCH, longeant l'asile Psychiatrique, jusqu'à Nganga Édouard, apportant ombre, et air frais aux passants ainsi qu'au secteur du « Quartier chic », n'est plus qu'un lointain souvenir.

Depuis, tous ces massifs ont fait place à des constructions d'édifices, privant la ville de ses différents « climatiseurs naturels ». Même les abords des avenues, naguère boisés, ont été laissés à découvert.

Mais, il y a aussi un autre phénomène, celui de l'engorgement des constructions.

Naguère l'habitat d'une concession était fait d'une maison centrale et d'une annexe, le cas échéant, une cuisine et des toilettes extérieures, dans un coin de la concession, au centre de laquelle se dressait un arbre, plus souvent d'essence fruitière.

Désormais, dans les parcelles, tous les arbres ont été coupés, surtout qu'il n'y a presque plus d'autorisation préalable et payante à prendre à la mairie, comme dans le temps, avant d'en abattre. Dans ces parcelles, il y a à peine de la place pour circuler, à travers des couloirs qui délimitent des « annexes pour locataires » ou autres boutiques et ateliers.

Le bornage de la parcelle était parfois fait d'arbres plantés aux quatre coins. Il y avait très peu de murs de clôture. Les haies de fleurs ou de tiges herbacées, servant de brosse à dents au matin, voire du grillage ou des fils barbelés densifiaient l'air vivifiant qui circulait librement au moindre courant.

Depuis, les murs d'enceinte de plus en plus élevés, tels ceux des prisons, ont transformé les parcelles en de véritables saunas pour ceux qui y vivent. L'air n'y circule pas. Ainsi comprimé, il devient chaud et sec, agressant autant le corps que les voies respiratoires. Aucune étude ne s’est penchée sur le phénomène qui serait peut-être à l’origine des cas de tension artérielle qui explosent dans la ville.

Dans les quartiers périphériques, points de chute de tout l'air chaud charrié depuis les quartiers en amont, la situation est encore plus difficile.

Le déboisement systématique a mis à découvert des habitations parfois faites en matériaux qui emmagasinent de plus en plus de chaleur.

En définitive, les facteurs climatiques dont sont victimes les Brazzavillois sont outre les aspects d'urbanisation, la conséquence de la non sauvegarde de l'essence même de « Brazza-la-verte ».

Brazzaville-la-verte était à la fois un cadre de vie et une philosophie de l'environnement, mettant en synergie l'homme et son milieu. Peut-être avons-nous fauté, en épousant un modernisme urbain qui trahissait nos fondamentaux culturellement écologiques.

Bertrand BOUKAKA/Les Échos du Congo-Brazzaville