Congo – Police : La dernière descente d'Oko-Ngakala dans les commissariats crée un malaise auprès des policiers

Depuis qu'il a appris à se faire accompagner des équipes de radio et de télévision dans ses descentes sur le terrain, le procureur de la  République près le tribunal de Grande instance, André Oko Ngakala n'attend plus que lui soient déférés les prévenus à « son parquet ». Sa dernière descente dans les commissariats de Brazzaville nord ainsi que les propos tenus, ont suscité l'ire de certains policiers.

Même s'il est de son ressort de faire procéder à tous les actes nécessaires à la recherche et à la poursuite des auteurs d'infractions pénales, de diriger l'activité de la police judiciaire, de contrôler les placements et les prolongations de garde à vue, ainsi que les interpellations, c'est dans les commissariats que André Oko Ngakala choisi de faire son show, au mépris même du cloisonnement des compétences des polices.

De nombreux policiers trouvent outrancières ces pratiques et convient le procureur à « balayer également devant sa porte, en matière de délais de détention et du respect des principes de l'État de droit, même s'il cela est de son ressort ».

Le procureur de la  République a interpellé le 1er décembre dernier à Brazzaville, les officiers de police judiciaire à obtempérer strictement à la loi relative aux délais de détention en garde à vue des personnes dans un commissariat de police. Un délai fixé à  78 heures.

Au cours des descentes dans certains commissariats de police des quartiers nord de Brazzaville,  André Oko Ngakala  a martelé auprès des officiers de police judiciaire que les droits en matière de détention des personnes placées en garde à vue prévoient qu’au-delà des jours déterminés par la loi, une détention ne peut dépasser, dans une certaine mesure, au maximum le délai de 48 heures.

Le procureur de la République a souligné à cette occasion que l’État de droit suppose une justice forte, impartiale et équitable. 

Même si les policiers ne récusent pas le dépassement de délais dans certaines détentions, ceux-ci font valoir le manque de moyens qui alourdissent des procédures qui sur le terrain, n’obéissent pas aux prescrits de la loi.

« Quand pour poursuivre une enquête dont on détient un des éléments, il faut attendre, faute de gazoil ou de véhicule, le temps de réunir l'argent du taxi pour effectuer une descente sur le terrain, ou encore le renfort des effectifs, comment voulez vous que l'on face les choses comme dans un livre ou dans les séries policières américaines. Une structure, des missions, des moyens, après, on exige les résultats. Pas le contraire! », se sont plaints certains officiers de police judiciaire, ayant requis l’anonymat.

D'autres sont plus vindicatifs. « C'est lui, le premier à ne pas respecter la loi. Pourquoi ne libère t-il pas tous ces prisonniers qui totalisent de nombreux mois de préventive ou qui ont purgé leur peine. Et puis, parlant de bébés noirs, quand nous les lui déférons, il en fait quoi. Ce sont les mêmes que nous arrêtons à nouveau qu'il libèrent pour X ou Y raisons, remettant en danger la vie des citoyens qu'il prétend protèger. Le problème c'est lui, pas nous.»

Quoi qu'il en soit, n'en déplaise aux uns et aux autres, et surtout fort de ses prérogatives, André Oko Ngakala a marqué son coup, empruntant même ses galons de général au directeur général de la police, pour convier les policiers, « à assainir Brazzaville, barrer la route à tous ces délinquants qui n’ont que pour métier de tuer, d’assassiner et de violer, afin que la paix règne dans tous les arrondissements pendant les fêtes de fin d’année ».

Voila qui devient justice d'avant-garde.

Bertrand BOUKAKA/Les Échos du Congo-Brazzaville