Mayoko : Pourquoi est-ce si difficile de démanteler les réseaux d’orpailleurs illégaux ?

Si le Congo-Brazzaville est connu depuis longtemps pour ses ressources aurifères, les districts de Mayoko et Moungoundou-Nord dans le Niari (sud) sont en proie,  depuis une trentaine d’années,  à un phénomène grandissant d’orpaillage illégal. Des ressortissants de la République démocratique du Congo (RDC), chercheurs d’or clandestins affluent dans les forêts des pays de Mayoko dans l’espoir de sortir de la pauvreté. A cela, il faut ajouter la présence massive des sociétés chinoises qui exploitent dans la contrée, au détriment de l’environnement et des populations locales qui paient le prix fort de l’utilisation du mercure pour l’extraction de minerai.

Les motifs d’implication des ressortissants de la RDC dans le trafic sont en effet multiples : il s’agit d’un système complexe, où s’entremêlent appât du gain. Dans l’ensemble, le motif économique est très clair : ils considèrent qu’ils n’ont pas d’alternative chez eux qui soit aussi tentante/avantageuse que l’orpaillage clandestin.

Pourtant, les rendements de cette activité sont assez aléatoires à l’image du fait de trouver de l’or ou non dans les forêts des pays de Mayoko : il y a une comparaison à faire entre ces ressortissants de la RDC et les joueurs de casino, qui sont toujours persuadés qu’ils vont se refaire.

Alors que le cours de l'or atteint des niveaux inégalés, des organisations criminelles se sont structurées autour de cette manne financière : le système « Article 15 », synonyme de débrouillardise, qui se caractérise par une structure verticale presque “micro-entrepreneuriale”, peine à être endigué par l’Etat congolais afin de casser le moteur économique de l’orpaillage en détruisant la logistique et les moyens de production de ces pilleurs d’or de nationalité étrangère.

Les campements issus de l’orpaillage sont aussi pour les creuseurs les lieux de vente de leur production, de trafic de drogue, de prostitution. Ces comptoirs d’achat permettent aux orpailleurs étrangers d’écouler leur production sans prendre le risque d’être détroussés sur les routes des grandes villes. Le gramme d'or est vendu à 35.000 F voir 40.000FCFA.

Le trafic se maintient malgré la répression grâce à un turnover très important. Le système répressif est contraint par ses moyens insuffisants : le nombre de gendarmes et policiers reste fixe, ce qui ne permet pas de réduire la taille du trafic.

Les pilleurs de l’or opèrent tranquillement dans les pays de Mayoko. Pour extraire la pierre précieuse, ils creusent un peu partout dans les forêts laissant derrière un véritable désastre écologique.

Plus grave, ils versent du mercure pour nettoyer les pierres précieuses. Résultat : quasiment tous les cours d’eau des environs sont pollués au mercure.

Au village Lehala par exemple, à un jet de pierre de la ville de Mayoko, les populations ont fini par réaliser depuis quelques mois que "le partenariat gagnant-gagnant", tant vanté par la Chine, n’est qu’un marché de dupes.

Écosystème dévasté, nappe phréatique polluée par des rejets cyanurés dont le contact avec la peau provoque des dommages sur celle-ci.

Leur bien commun, la rivière Lehala, a été abîmé. Les habitants n’ont plus d’eau ni pour boire ni pour se laver.

Le contact de cette eau avec le corps provoque d’intenses démangeaisons et on se gratte jusqu’à s’arracher la peau.

La rivière Lehala est détruite entièrement au mépris des lois de la République.

On rappelle que la montée en puissance de la Chine en matière économique au Congo-Brazzaville ne fait pas que des heureux. Loin de là. La colère gronde un peu partout.

Les scandales se sont multipliés à travers le pays impliquant des Chinois dans des opérations irrégulières, voire mafieuses.

Désormais, les entreprises chinoises, bien présentes sur le terrain, font comme tout le monde pour se remplir les poches. Braconnage des espèces menacées, prédations sur les ressources minières, trafic de bois précieux... Tous les coups sont permis.

Mais jusqu’à quand ? Les réponses sont sur la table du gouvernement Makosso.

Jean-Jacques DOUNDA / Les Echos du Congo-Brazzaville