Congo : Création de la Haute autorité de lutte contre la corruption (HALC)

Le Conseil des ministres qui s’est réuni jeudi 20 septembre 2018 au Palais du peuple, sous la très haute autorité du président de la République, Denis Sassou Nguesso, propose de dissoudre l’actuelle Commission nationale de lutte contre la corruption, ainsi que l’Observatoire anti-corruption, afin de les remplacer par une Haute autorité de lutte contre la corruption (HALC) afin d’atteindre l’objectif de rupture avec les mentalités déviantes et les comportements négatifs du passé, et dans le souci de prévenir et réprimer plus efficacement les actes de corruption, de concussion et de fraude.

Cette Haute autorité deviendra le pivot essentiel, pour le compte des pouvoirs publics, du processus de lutte contre la corruption et autres infractions connexes. Elle aura des missions de prévention et des pouvoirs d’investigation accrus.

La Haute autorité, composée d’un président et d’autres agents dont la nomenclature est rappelée dans le corps du texte en examen, connaîtra un mode de recrutement fondamentalement nouveau et original. En effet, chaque poste sera ouvert à candidature publique. C’est-à-dire que tout Congolais, jouissant de ses droits civiques et non condamné pour des crimes ou délits, ou à une sanction privative de liberté, pourra postuler.

C’est au terme de ce processus de sélection rigoureusement nouveau que les animateurs de la Haute autorité de lutte contre la corruption seront nommés par décret en Conseil des ministres ou décret du premier ministre, chef du gouvernement, en fonction du poste concerné.

Cette innovation a pour vocation, outre la qualité et la compétence accrues des cadres qui la composeront, critère permanent dans le choix des agents publics dans notre pays, de garantir l’indépendance de l’institution, afin de rendre son travail efficace et crédible.

Dans le cadre de cette réforme importante, attendue par l’opinion et soutenue par les partenaires du Congo, la Haute autorité devra assurer un « reporting » trimestriel de ses activités auprès des plus hautes autorités de l’Etat, président de la République, premier ministre et ministre en charge des questions de corruption, afin qu’à travers ces responsables éminents, le peuple congolais soit édifié sur la constance et la fermeté de la lutte contre les antivaleurs dans notre pays.

Le président de la République a rappelé la ferme volonté des pouvoirs publics de poursuivre résolument la lutte contre les antivaleurs, parmi lesquelles la corruption, la concussion et la fraude.

Il s’est félicité du caractère équilibré du texte en discussion. En effet, le projet de loi inscrit les prérogatives de la future Haute autorité de lutte contre la corruption dans l’ordonnancement juridique national, notamment par la prise en compte des fruits de l’expérience proprement congolaise en la matière, tout en adoptant les meilleures pratiques internationales en la matière.

Denis Sassou Nguesso a invité le parlement, compte tenu de l’importance de ce texte, à s’emparer de ce débat et à apporter, dans l’examen de ses principales dispositions, l’enrichissement, l’attention et l’esprit de responsabilité dont il fait habituellement preuve vis-à-vis des textes qui lui sont soumis.

Après examen et discussion, le Conseil des ministres a approuvé le projet de loi portant création de la Haute autorité de lutte contre la corruption. Il sera transmis au parlement pour adoption.

En proie à une forte corruption dans son circuit administratif, le Congo veut prendre des mesures pour lutter efficacement contre le phénomène et, partant, libérer les victimes de leurs prédateurs. Le gouvernement se dit déterminé à lutter contre ce fléau. Mais le phénomène gangrène les rapports entre l’économie et le système politique.

Une dette publique écrasante, des recettes toujours portées par les produits pétroliers… Trois ans après le début de la crise financière, les efforts consentis n’ont pas encore relancé l’économie et peinent à convaincre le FMI.

Certes, depuis plusieurs décennies, les gouvernements successifs ont essayé, chacun en sa manière, d’engager une lutte contre la corruption. Toutefois, il s’agit d’actions sporadiques des politiques qui ne suffisent pas pour mener une bataille de fond contre la corruption.

Les commissions d’enquête s’enchevêtrent sans donner de probants résultats si, elles n’apparaissent au final comme des effets d’annonce ou de propagande de l’Exécutif.

La lutte échoue parce que la stratégie n’agit pas sur les bons leviers. Il est donc impérieux d’aller plus loin et en profondeur. Néanmoins, en amont, la priorité doit être accordée à l’éducation civique et à la culture du respect du bien public, des valeurs qui induisent de réels changements dans la société.

L’élaboration et la mise en œuvre de procédures administratives simplifiées qui laissent place à une clarté de l’action publique sont indispensables pour gagner cette lutte. Car moins de bureaucratie signifie moins d’opportunités que les fonctionnaires abusent de leur pouvoir.

Si nous voulons voir, la corruption reculer un jour au Congo, la justice doit aussi jouer sa partition, une justice indépendante capable de s’affranchir des pouvoirs politiques, des milieux économiques etc.

Jack MAÏSSA / Les Echos du Congo Brazzaville