Serge Magloire Adanga : Un nouveau Docteur en Philosophie pour le Congo-Brazzaville

Serge Magloire Adanga, originaire du Congo-Brazzaville, a été élevé, à l’unanimité du jury, au titre de Docteur en Philosophie. La cérémonie y relative s’est déroulée ce mercredi 6 décembre 2023, à L’École des hautes études en sciences sociales (EHESS) de Paris en France, en présence d’un parterre des universitaires, des étudiants, des parents, amis et connaissances.

La thèse présentée, avec une clarté biblique, par Serge Magloire Adanga se compose d’un volume de 332 pages et divisée en trois grandes parties comportant respectivement cinq chapitres.

Ce travail titanesque intitulé « Le Système de Conflits en République centrafricaine : Analyse des interventions des Républiques du Tchad, du Congo et de l’Organisation des Nations Unies (2000-2016) » a pour objet une étude fouillée des dynamiques, acteurs et enjeux du « système de crise régional-centre-africain » et leurs effets sur sa profondeur et sa durabilité.

La première partie montre comment ce système de conflits s’est formé en examinant la situation sécuritaire sous régionale et ses répercussions en République centrafricaine. Elle procède à l’identification de l’élément déclencheur de ce système de conflits et ses conséquences, à la présentation des conflits qui le compose et des acteurs qui s’y engagent, précisant les facteurs qui ont favorisé ou facilité sa mise en place, ainsi que ses différents et multiples enjeux.

La deuxième partie se concentre ensuite sur les différentes interventions des Républiques du Tchad et du Congo dans le cadre de la nature de leur implication au sein du système de crise centrafricain démontrant que ces interventions sont un facteur essentiel de la durabilité du conflit interne de la Centrafrique et de la mise en place d’un complexe et récurrent « système de conflits » particulier à cette région du continent africain.

La troisième partie enfin, présente les interventions de l’Organisation des Nations Unies : dans les mobiles et la nature de leurs mandats, mais aussi et plus particulièrement leurs inefficacités et déviances, montrant en quoi elles peuvent être considérées comme des facteurs génériques et de permanence du système de conflits en Centrafrique.

La thèse de Serge Magloire Adanga s’appuie, avec luxe et détails, sur un corpus de sources important et un remarquable travail de terrain.

Le travail démontre une maîtrise consommée des méthodes et des outils de la recherche scientifique.

Ce travail de recherche et de démonstration prend sa source sur plus de vingt ans de troubles internes, crises politiques et sociales ou les violences armées, ont instauré en RCA un état d’insécurité et de conflictualité permanent dont les développements impliquent les Etats voisins et l’ensemble de la sous-région dans leurs effets délétères. Cette situation dans ses tragiques conséquences humanitaires implique aussi la communauté internationale pour ce qui concerne le devoir de protéger les populations et la nécessité de restaurer la paix civile. Ainsi les Républiques du Tchad et du Congo sont intervenues dans le cadre de ces crises intra étatiques, devenues par le fait Trans étatiques tandis que l’Onu se mobilisait pour tenter de ramener la paix et stabiliser la sécurité du pays et des populations.

Cependant, force est de constater que loin d’aider à la mise en place d’une sortie de crise et à la restauration de la paix civile, ces différentes interventions, aux mobiles, à la nature et aux capacités très hétérodoxes ont participé – paradoxalement aux objectifs affichés – à une transformation des systèmes de conflictualités internes. Elles ont aussi renouvelé l’insécurité globale et permanente des populations dans une « guerre de tous contre tous » ou la multiplicité des acteurs, des enjeux et des influences extérieures fige une forme de « permanence de l’Etat de guerre » au détriment de tout renforcement de l’Etat de droit, dans sa souveraineté légitime et ses fonctions régaliennes.

Elles ont par ailleurs aggravé la situation des populations en ce qui concerne leur protection face aux violences criminelles et à leur nécessaire soutien humanitaire suite aux désastres socio-économiques de décennies de conflictualités.

Serge Magloire Adanga s’interroge ainsi, à la mesure de ce désastre qui relève des ressorts d’une tragédie shakespearienne sur « ce qu’il y a de pourri au Royaume de Danemark ». Il porte sa réflexion sur les dynamiques de ces crises prolongées dans une analyse précise des contextes, des acteurs et des différents enjeux constitutifs de leurs interventions. Il s’efforce de mesurer les mobiles autant que les effets de ces interventions extérieures, régionales et internationales dans la mise en place d’ »une crise permanente » renouvelant par là même un système insolvable de crises et de conflictualités, tumeur qui métastase en convulsions régionales dont la RCA serait le centre géopolitique et géostratégiques des rivalités, transnationales et interétatiques.

Pour votre gouverne, c’est le professeur Rémy Bazenguissa-Ganga, IMAF-EHESS / France qui était le directeur de thèse.

Composaient le jury :

Charles Zacharie Bowao, Université Marien Ngouabi du congo-Brazzaville,

Michel Boyer, Université Internationale de Rabat au Maroc,

Aïcha Pemboura, Université Yaoundé II au Cameroun,

Sami Makki, Sciences Po, Lille en France,

Andrea Ceriana Mayneri, CNRS-IMAF en France,

Rémy Bazenguissa-Ganga, IMAF-EHESS en France.

Jean-Jacques Jarele SIKA / Les Echos du Congo-Brazzaville