Congo – Monde du travail : Le spectre de la grève plane presque partout, la situation est explosive

Entre retards de salaires, accumulation de nombreux mois impayés et détérioration du cadre de travail, de nombreuses structures étatiques à budgets de transfert ont atteint le point de rupture, avec le déclenchement des grèves ou l'imminence de celles-ci. Au CHU de Brazzaville, à l'Université Marien Ngouabi, à la Société nationale d'électricité ou autre société de Transport public urbain, la grogne des travailleurs a atteint le point d'ébullition.

À l'issue d'une assemblée générale tenue le jeudi 4 octobre, les agents du CHU de Brazzaville ont décidé d'observer une grève assortie d'un service minimum. Si leurs revendications ne sont pas satisfaites au 14 octobre, la grève sera totale.

Une grève assortie d'un service minimum qui prouve la bonne foi des travailleurs, quoique doublée d'un ultimatum pour contraindre la tutelle à trouver des solutions aux problèmes posés, il y a bien longtemps que le malaise couvait au CHU de Brazzaville. Les travailleurs y traînent quatre mois de retard de salaire. Nombreux d'entre-eux, locataires, ne peuvent s’acquitter de leur loyer. Bien pire, beaucoup n'ont pu honorer leur devoir de parents, en assurant la rentrée scolaire de leurs enfants.

L'intersyndicale élaguée des éléments soupçonnés de corruption a pris les choses en mains pour lancer une grève qui aura fort-à-propos, de lourdes conséquences sur les malades.

À l'Université Marien Ngouabi, la situation n'est guère meilleure. La grève déclenchée depuis le 1er septembre semble laisser impassible la tutelle.

Au cours de sa réunion du 3 octobre, le collège intersyndical a constaté avec un profond désarroi que les problèmes posés par le personnel de l'université Marien Ngouabi sont restés lettre morte et s’accumulent au contraire. Du payement intégral des salaires des mois de juin, juillet et août 2017 ; de l'apurement des heures complémentaires de surveillance et d'encadrement des thèses et mémoires des années antérieures ou du décaissement de la subvention de fonctionnement des 1er, 2ème et 3ème trimestre 2017, aucune de ces revendications n'a connu un début d'exécution.

S'indignant de cette indifférence totale qu'affiche la tutelle, sur une situation qui clochardise et paupérise les travailleurs de l'université Marien Ngouabi, le collège intersyndical a décidé du maintient de la grève. Il appelle ses militants à la vigilance contre les briseurs de grève et les tentatives de sa récupération politicienne et convoque une assemblée générale des travailleurs pour le vendredi 6 octobre à 10 heures, à Bayardelle.

Que dire de la Société nationale d'électricité où la tension est des plus palpables. Le collège intersyndical y a convoqué une assemblée générale le mardi 10 octobre.

Une grève dans ce secteur, qui se manifesterait par une absence de fourniture en électricité, paralyserait de nombreux secteurs d'une économie déjà fragilisée par la crise qui secoue le pays.

À la STPU, même si l'on a repris le travail, profitant de la rentrée des classes pour se donner les moyens de résoudre l'épineuse question des salaires, rien n'est véritablement acquis dans la durée. Le feu a été certes maîtrisé, mais il couve encore, et peut repartir à tout moment si justement, les revendications des travailleurs ne sont pas satisfaites dans les délais.

Même à l'assemblée nationale, la situation serait à la diète. Nombreux des nouveaux députés qui s'étaient endettés pour battre campagne aux législatives, se retrouvent incapables à honorer le remboursement de leur prêt, faute de subsides.

Dire qu'au plan national, la situation devient délétère, avec une espèce de veillée d'arme sociale.

Les conclusions du FMI, qui vient de boucler sa réunion de travail avec le gouvernement, n'inspirent pas à l'optimisme, quant à l'issue de la situation davantage explosive de jour en jour.

Bertrand BOUKAKA