France – Présidentielle : Au parti socialiste, à chacun sa fronde

Le jugement est sévère contre Manuel Valls, après son ralliement à Emmanuel Macron, au mépris de son engagement de soutenir le vainqueur de la primaire socialiste, Benoît Hamon. Entre frondeurs d'hier et d'aujourd'hui, il fallait s'y attendre. Mais, à qui la faute ?

"Monsieur Déloyal", "Valls le pivot devenu girouette", de nombreux éditorialistes ont à travers des formules ciselées, stigmatisé l'attitude de l'ex-Premier ministre Manuel Valls.

Dans son éditorial, Laurent Joffrin est cinglant : "Il était l'apôtre d'une gauche qui pense le réel. Il devient l'homme d'une gauche qui prend le vent. Il voudrait être le pivot d'un grand rassemblement progressiste. Le voilà changé en girouette. Il y a décidément une victime dans cette campagne : le respect de la parole donnée".

Vu sous cet angle, celui de la morale tout court, on donnerait à Benoît Hamon le bon Dieu sans confession. Lui, la « victime ». Mais, Hamon ne récolte t-il pas outre mesure ce qu'il a semé en d'autres temps ?

La politique, ce n'est pas un domaine « de fakir et de moine », là, «  on a les mains sales », qu'on ne s'y méprenne pas. Et on y « agit toujours comme si quelque chose dépassait en valeur la vie humaine ». Encore moins les sentiments ou la parole donnée.

"Si, aujourd'hui, Manuel Valls a rompu son engagement de soutenir Benoît Hamon, c'est peut-être qu'en bon éléphant du PS il a la mémoire longue, et se souvient du frondeur qui a pourri pendant deux ans l'action du gouvernement socialiste".

Martine Aubry, mentor-frondeuse de Benoît Hamon ne s'est jamais remise de sa défaite à la primaire socialiste contre François Hollande. Depuis lors, elle s'est mise en travers du quinquennat, devenant même la caution morale, sinon politique des frondeurs.

Le fait d'avoir, de part et d'autre des courants politiques du PS, empêché à François Hollande de se présenter à nouveau - une première en l'espèce - portait en soi les germes d'une division.

Son bilan, condition sine qua non pour se représenter ne serait finalement pas aussi désastreux. Même s'il n'a pas tout réussi, François Hollande a au moins maintenu en vie « cette France malade » que Nicolas Sarkozy lui avait refilée moribonde. Le protocole de soins qu'il a mis en place semble donner de bons résultats, même si chacun veut se mettre à la place du médecin et prétend qu'il ferait mieux.

Alors que l'on attendait de Benoît Hamon qu'il rassemble son camp après sa victoire saluée par tous, il a plutôt couru vers d'autres candidats parfois à l'apport dérisoire pour son élection.

Désormais, lui le dernier dans les sondages, parmi les « 5 grands candidats », aimerait que Jean Luc Mélenchon se retire pour lui laisser la place, lui qui se prétend être le grand rassembleur de la Gauche. Mais, a t-il été attentif aux avertissements que lui a lancé le clan Valls après sa victoire à la primaire ?

Benoît Hamon pensait avoir tout gagné et les autres, en l’occurrence Manuel Valls, avoir tout perdu. Il oubliait que dans une famille, en dépit des frictions, on gagne ensemble ou on perd ensemble.

N'en déplaise aux donneurs de leçons de morale politique, l'attitude de Manuels Valls va fédérer vers Emmanuel Macron de nombreux déçus de Benoît Hamon ou de François Fillon, car tous ayant les « mains sales », autant se porter vers celui qui semble les avoir moins sales pour, comme ils le disent tous, faire barrage aux extrèmes de droite et de gauche que seraient Marine le Pen et Jean Luc Melenchon.

Benoît BIKINDOU