Les agressions homophobes et transphobes sont souvent commises par des proches, notamment les parents. Un rejet, source de grande souffrance, qui va parfois jusqu’au harcèlement, aux agressions physiques et même au suicide. « On te renie, tu n’es plus notre fils », ont été les derniers mots prononcés par les parents de Ravi Sanctifié Bounkazi Sendo, 26 ans, de nationalité congolaise, à l’annonce de sa mise en couple avec un jeune homme, le neveu d’un officier supérieur de la police nationale, juste avant de le chasser du domicile familial, le laissant sans ressources et sans solution d’hébergement, rapporte plusieurs médias africains.
Derrière son sourire, ce jeune homosexuel congolais, Ravi Sanctifié Bounkazi Sendo, semblait vivre un calvaire depuis 2020. L’annonce à ses parents a pris la tournure "d'un drame antique". Son cousin tombe par hasard sur des images pornographiques qu’il découvre dans son téléphone.
Discrètement, il effectue des captures d’écran. Au cours d’un repas, son cousin montre les images à son oncle. Une bombe vient d’exploser. Son aveu a eu un effet dévastateur. Il y a eu un silence de mort. Le ciel s'est écroulé sur leur tête.
Délaissé à la naissance par son père, son grand père maternel avait décidé d’exécuter par lapidation son petit fils comme c’est le cas dans les pays chrétiens en Afrique subsaharienne.
Ne sachant plus que faire, le jeune homosexuel mène une vie de cache-cache et est devenu un SDF (Sans Domicile Fixe). Avec cette menace qui plane sur sa personne, il a fait plusieurs quartiers de Brazzaville pour pouvoir échapper à une arrestation ou à la mort.
Cela va-t-il continuer et pour combien de temps ?
Le jeune homosexuel a eu la vie sauve grâce à la complicité d’une congrégation religieuse. Ce faisant, il a noué une relation avec un prêtre qui, compte tenu des risques encourus, va I ‘aider finalement à quitter le Congo-Brazzaville par voie aérienne le 16 septembre 2023.
Le 17 septembre 2023, il arrive en France, laissant derrière lui, son grand père, victime d’un AVC, dès qu’il a découvert l’orientation sexuelle de son petit-fils.
Depuis la France, le jeune homosexuel est partagé entre remords, chagrins et suicide. L’état grabataire de son grand-père lui a toujours pesé sur sa tête.
Plus grave, depuis son départ de son Congo natal, il a reçu plusieurs plaintes de la police judiciaire. Il est convoqué pour répondre des accusations de détournement sexuel.
Un officier supérieur de la police nationale accuse Ravi Sanctifié Bounkazi Sendo, d’avoir entraîné son neveu dans le sombre chemin de l’homosexualité. Son ex petit ami à son tour subit aussi une pression auprès de sa famille.
Il est accusé d’avoir gâché la vie du neveu de cet officier supérieur de la police qui a décidé, à tous les prix, d’écraser celui qu’il désigne par « cafard ».
La mère de Ravi n’ayant pas supporté toute la pression sociale et policière, est devenue portée disparue. Plus aucune nouvelle de sa mère et de son ex petit ami.
Au Congo, il est exposé aujourd’hui à un grand danger dont il n’a aucune chance de s’en sortir, car fiché à la police pour n’avoir pas répondu à toutes les plaintes déposées au domicile familial.
Ainsi commence, depuis plusieurs mois, pour Ravi Sanctifié Bounkazi Sendo, un calvaire qui est loin de connaître la fin car l’officier supérieur de la police a lancé ses subalternes à ses trousses sous prétexte que toute personne qui arriverait à arrêter « le sale pédé », aura un précieux cadeau. Une situation qui met en péril sa santé et sa survie.
En juin 2024, il a tenté de se suicider dans la rue Molière à Evreux en Normandie. Il a été sauvé in extremis par deux éboueurs qui ramassaient les poubelles.
« Si je repars à Brazzaville, c’est la mort de toute façon. Si je reste comme ça en France, c’est le calvaire. Autant éviter aux autres de se salir les mains », a-t-il lancé à ces sauveurs de circonstance, les yeux en larmes et totalement défiguré par la tristesse.
Né le 24 décembre 1998 à Brazzaville, Ravi Sanctifié Bounkazi Sendo est délaissé à la naissance par son père. Il a été élevé par son grand-père maternel.
En 2013, à l’âge de 15 ans, il est rattrapé par son attirance pour les hommes et commence à flirter avec des camarades de classe.
En 2018, après I ‘obtention de son baccalauréat, il a suivi des études de biologie à l’université Marien Ngouabi de Brazzaville. Il fréquente un camarade de classe, puis, quelques mois plus tard, un feu s’allume dans leurs cœurs. Un amour fou est né entre les étudiants qui prennent tout de même soin de dissimuler leur liaison.
En Afrique subsaharienne, l'homosexualité est largement criminalisée, plus de la moitié de ses pays interdisent ou répriment les rapports homosexuels, parfois de la peine de mort. Les lois répriment cette orientation sexuelle, exposant la communauté LGBTQI+ à la stigmatisation et aux violences de tout genre.
Les personnes LGBTI se retrouvent confrontées à un recul inquiétant des avancées, à des remises en cause de leur identité et à de gros obstacles à leurs droits juridiques et sociaux. Les arrestations et détentions arbitraires se sont multipliées, le simple fait d’être soi-même étant considéré comme une infraction pénale. Dans certains endroits, la peine de mort plane tel un spectre terrifiant – un châtiment injuste et brutal qui sanctionne le fait d’être qui ils sont. Nous sommes confrontés à ce qui constitue assurément une crise croissante d’une guerre juridique homophobe.
Sur 45 pays en Afrique sub-saharienne, 28 disposent encore de législations interdisant ou réprimant l'homosexualité. Dans ces textes de loi et surtout le code pénal, cette orientation sexuelle est clairement définie comme une pratique 'contre-nature'. Les officiers de police et les tribunaux ont donc de facto une prise de position 'naturelle' qui criminalisent les faits et gestes de toutes personnes identifiées comme étant gay, lesbienne, transgenre ou queer.
A ce contexte de loi défavorable s'ajoute le poids de la culture et souvent de la religion.
L’univers de la sexualité en Afrique depuis l’ère du christianisme est entouré de tabous, à l’instar de plusieurs autres régions du monde.
Au Congo-Brazzaville, le plus souvent le sexe se pratique davantage qu’il ne se dit. Même à travers les contes lorsqu’il est abordé, c’est par le biais de métaphores, d’analogies, d’ellipses ou encore de métonymies.
Nick PARAISO