Congo : Un projet de réinsertion sociale des "Bébés noirs" à l’étude en vue de restaurer la paix et la sécurité dans les quartiers

La Commission Nationale des Droits de l’Homme, en partenariat avec les forces vives, la société civile congolaise, les forces de l’ordre et les Révérends Pères, Pasteurs et Imams, représentant les confessions religieuses et des délégués leaders des Bébés noirs et Kulunas, ont organisé, le 29 décembre 2022, à son siège, une réunion de concertation sur la problématique du phénomène des bébés noirs et kulunas dans notre pays. Comment l’éradiquer et réaliser leur réinsertion sociale, scolaire et économique dans la société. Cette cérémonie a été patronnée par Mme Yvette Marie Yolande Ambendet-Mbeto, membre du Bureau et Trésorière de la Commission Nationale des Droits de l’Homme, en lieu et place du président Valère Gabriel Etekat-Yemet, empêché.

La réunion de cette concertation s’est focalisée autour de la problématique du phénomène des bébés noirs et kulunas, qui ne cesse de prendre de l’ampleur dans notre pays, notamment dans les grandes agglomérations urbaines. Le projet intitulé « Droits de l’Homme – Paix – Sécurité dans les quartiers : Lutte contre le phénomène des bébés noirs et kulunas ». Par conséquent, le problème de sécurité dans nos différents quartiers et comment éradiquer ledit phénomène puis trouver des pistes de solutions pour leur réinsertion sociale, scolaire et économique dans la société congolaise.

Dans son message, Mme Yvette Marie Yolande Ambendet-Mbeto a d’emblée souhaité, au nom du président de la Commission Nationale de Droits de l’Homme empêché, la bienvenue aux différents invités ainsi que les meilleurs vœux de bonne santé, de bonheur et de réussite pour la nouvelle année 2023.

Elle a également fait remarquer que : « Dans plusieurs messages à la Nation, Son Excellence Monsieur Denis Sassou-N’Guesso, Président de la République, chef de l’Etat, évoque le phénomène des Bébés noirs et Kulunas ». C’est ainsi que, le 17 décembre 2019, le Président de la République a abordé cette question en priorité : « C’est parce que les jeunes constituent plus de 60% de la population et qu’ils sont l’avenir du pays que j’aborderai en priorité cette question. C’est l’avenir de notre pays. Les jeunes sont appelés à assurer le devenir de la nation », a-t-elle déclaré.

Par ailleurs, « dans son récent message à la Nation du 28 novembre 2021, il relève ’’la réflexion sur la prévention et le traitement de la délinquance juvénile aggravée par des actes de violence et de criminalité perpétrés par les jeunes en milieu urbain’’, a rappelé Mme Yvette Marie Yolande Ambendet-Mbeto.

Subséquemment, « le 28 novembre dernier, le chef de l’Etat a « solennellement exhorté le gouvernement à engager des solutions appropriées pour éradiquer la délinquance juvénile, l’insécurité péri-urbaine…. A cet effet, il a enjoint le gouvernement à rendre très vite opérationnels et à relancer le programme DDR pour une prise en main effective de notre jeunesse en quêtes de repères et en proie à la radicalisation et à l’extrémisme violent », a rappelé Mme la Trésorière.

En conséquence, agissant en tant que, espace de concertation, de dialogue entre les citoyens, les pouvoirs publics et la société civile, d’une part ; et étant chargée, aux termes de l’article 5 de la loi 30-2018 du 7 août 2018, de fournir au gouvernement, au Parlement ou à tout autre organe compétent, des avis, des recommandations, des propositions ou des rapports concernant toute question relative aux Droits de l’Homme, d’autre part, la CNDH, se référant aux directives formulées par le Président de la République, dans son message du 28 novembre 2022 sur l’Etat de la Nation, propose ainsi un projet dénommé : « Les Droits de l’Homme – Paix – Sécurité dans les quartiers : lutte contre le phénomène des Bébés noirs et Kulunas ».

Selon Mme Ambendet-Mbeto, « ce projet est conçu, suivant une autre approche de solutions solidaires durables, basée sur l’éducation aux Droits de l’Homme et à la citoyenneté, la mobilisation et la participation communautaire, et le partenariat entre acteurs (gouvernement, institutions, autorités locales, ONG, confessions religieuses, familles, écoles, partenaires techniques et financiers) pour aborder autrement, ensemble, le phénomène des Bébés noirs et Kulunas ».

« C’est dans ce cadre et dans cette optique que la réunion de concertation va baser ces échanges. Il s’agira donc d’examiner les modalités pratiques du partenariat inter acteurs, pour la mise en œuvre du projet, en vue de : éradiquer le phénomène des Bébés noirs sur toute l’étendue du territoire national ; réaliser la réinsertion sociale, scolaire, citoyenne et économique de cette frange de la jeunesse de notre pays ; rétablir durablement la paix dans tous les quartiers de toutes nos agglomérations urbaines. Tels sont l’agenda et les objectifs de cette réunion de concertation », a-t-elle conclu.

De son côté, le Pasteur Ben Chaddaï Ngapoula de ’’L’Assemblée Pain de Vie’’ de Talangaï, qui a bien voulu prendre en charge, quelques-uns des leaders de ces gangs (Arabes et Américains) cohabitent désormais, grâce à une stratégie mise en place par le Pasteur et sa bonne volonté usée, pour ramener ses jeunes à la raison et le bon sens. « C’est une situation généralisée et qui devient de facto un fléau, très puissant et très inquiétant. Ça demande de l’expérience, de l’énergie, beaucoup de force et surtout de tact, afin de persuader les jeunes gens. Tu peux arriver dans leur milieu et être attaqué par la suite ! Si tu n’es pas prêt pour cette mission. On parle de groupes de gans : si on prend le meneur ou le chef de gang des Américains, lui va convaincre ses membres et celui du gang des Arabes également, on les rassemble pour éteindre le feu, afin qu’ils deviennent un seul groupe pacifique. Pour cesser après leurs actes odieux qu’ils commettaient auparavant. J’ai fini par comprendre que, ce qui les pousse à agir de la sorte, c’est parfois seulement la faim, le dénuement et l’oisiveté. Il suffit de leur apporter ce dont ils ont besoin, cela fera qu’ils se détournent de leurs activités de violence et de banditisme. Ce sont les besoins qui les poussent à agir ainsi », a expliqué le Pasteur encadreur des Bébés noirs et Kulunas.

D’ailleurs, un ancien bébé noir et kuluna opérant au quartier Talangaï donne son témoignage: « J’étais parmi les co-fondateurs du groupe Les Bébés 32, j’ai décidé d’arrêter il y a cinq (5) ans. J’ai appris à réparer les appareils électro-ménagers (Téléviseurs, Radios, appareils téléphoniques). Donc je suis devenu réparateur. On a eu à tuer, à blesser, à violer et commettre des tas de choses, mauvaises pour notre société. On n’a rien gagné, sinon qu’apporter la désolation. Aujourd’hui, je le regrette amèrement. J’ai demandé pardon à Dieu, je me suis confessé et je me suis baptisé. Et me suis détourné définitivement de ce chemin. Je demande seulement à l’Etat, à nos autorités de nous venir en aide afin que chacun de nous ait une ’’Bricole’’, un petit job, un travail pour subvenir à nos besoins. Je dirai, à mes frères et sœurs, nous avons aussi des filles dans nos gangs, de cesser avec ces pratiques, ces actions violentes de banditisme. De laisser de ne plus continuer », a-t-il raconté.

Au terme de cette réunion de concertation, les suggestions, recommandations puis, le projet final sera transmis et remis aux autorités compétentes et habiletés pour approbation et application des mesures retenues.

VALDA SAINT-VAL / Les Echos du Congo-Brazzaville