Le franc CFA va être remplacé l’année prochaine par l’Eco dans huit pays d’Afrique de l’Ouest

Depuis la Côte d’Ivoire, le président français, Emmanuel Macron a profité de ce voyage en Afrique pour assurer que le passé colonial de la France était « une faute morale » et annoncer la fin du franc CFA, le « franc des colonies françaises d’Afrique ». Il va être remplacé l’année prochaine par l’Eco dans huit pays d’Afrique de l’Ouest.

Ci-gît le franc CFA. Le numéro un français et le président ivoirien, Alassane Ouattara ont annoncé samedi soir pour huit pays d'Afrique de l'Ouest le faire part de décès hautement symbolique de cette monnaie héritée de l'histoire coloniale française et « vestige de la Françafrique », dixit l'Elysée.

« J’ai souhaité engager la France dans une réforme historique et ambitieuse de la coopération entre l’union économique et monétaire ouest africaine et notre pays. Nous le faisons pour la jeunesse africaine », a déclaré le successeur de François Hollande.

« Ayons le courage d’avancer, de bâtir un partenariat décomplexé avec nos partenaires. Avec la réforme du Franc CFA, nous faisons un grand pas pour écrire une page nouvelle de notre relation avec l’Afrique », a-t-il ajouté.

Émise par la Banque centrale des Etats d'Afrique de l'Ouest (BCEAO), elle est utilisée dans huit Etats (Bénin, Burkina Faso, Côte d'Ivoire, Guinée-Bissau, Mali, Niger, Sénégal et Togo).

Cette « réforme historique majeure », telle qu'elle est présentée par Emmanuel Macron, ne concerne pas pour l'instant les six pays d'Afrique centrale qui utilisent le franc CFA mais qui forment une zone monétaire distincte.

Si cette monnaie commune présente nombre d'avantages, notamment une certaine stabilité du fait de son lien avec l'euro, elle est, depuis des années, irritante pour une partie de l'opinion et des dirigeants de ces pays tant son histoire puise dans un passé colonial douloureux.

C'est en effet un décret du général de Gaulle qui a donné naissance en 1945 au « franc des colonies françaises d'Afrique » dont les billets continuent d'être imprimés à Chamalières (Puy-de-Dôme). Rebaptisé « franc de la communauté financière d'Afrique », ce système n'a cessé d'être remis en question depuis plusieurs années.

Pour tourner la page de ce passé monétaire compliqué - sans tout à fait le renier - le franc CFA va être rebaptisé. Son nom, à terme : « Eco ». Deux autres changements majeurs vont intervenir selon un calendrier qui sera mis en place dès l'année prochaine : la fin de la centralisation de la moitié des réserves de change de la BCEAO au Trésor français ainsi que le retrait des représentants de la France des instances de gouvernance où elle était présente. Mais le lien de parité fixe avec l'euro (1 euro = 655,96 francs CFA) est maintenu. Et avec lui, un certain rôle pour Paris.

Pour rappel, établi en 1945, une quinzaine d'années avant l'indépendance des colonies françaises, la valeur du franc CFA est aujourd'hui indexée sur l'euro (1 euro = 655,96 francs CFA). Les États utilisant le CFA devaient par ailleurs déposer 50 % de leurs réserves en France. En contrepartie, leur convertibilité illimitée avec l'euro leur donnait une crédibilité internationale.

C'est désormais terminé pour les réserves et aussi pour la présence de Français dans les organes de gouvernement de la BCEAO, la Banque centrale des États d'Afrique de l'Ouest. Malgré tout, la France va continuer à accorder sa garantie.

Voilà donc un chantier monétaire nouveau qui s'ouvre et qui promet bien des débats. Il se greffe à une question sur la table depuis des années, celle d'une devise unique dans la région qui a longtemps suscité les réticences du Nigeria, lequel exigeait que l'éventuelle monnaie commune soit déconnectée du Trésor français.

Il semble qu'un verrou soit sur le point de sauter. Reste à savoir les modalités précises des changements opérés au niveau du franc CFA et leur adaptabilité à la nouvelle donne d'une greffe avec d'autres monnaies qui, elles, ne bénéficient pas de la garantie du Trésor français.

Jacques Jarele SIKA / Les Echos du Congo Brazzaville