Congo – Intempéries : Des obsèques, les pieds dans l'eau, le cercueil à l'épaule

En ces temps de saison de pluies, il ne fait pas bon vivre pour les habitants des quartiers périphériques de la capitale congolaise, Brazzaville. Du fait des intempéries, presque tout y est accompli « hors normes ».

Entre la crainte de voir sa maison emportée par les eaux non canalisées par les pouvoirs publics et l'obligation de remplir des devoirs de deuil dont on ne peut se départir, de nombreux habitants de Brazzaville vivent un véritable cauchemar en cette saison de grandes pluies.

Avec les pluies de ces derniers temps, les veillées funèbres, moments intenses et sacrés pour l'adieu au défunt, sont régulièrement perturbées par la montée des eaux.

Même le chapiteaux dressés pour que les « veilleurs » s'y abritent ne servent plus à grand chose, tant les eaux venant des avenues, d'où elle devraient être évacués par les canalisations qui s'y trouvent, refluent dans les parcelles qu'elles inondent outrageusement.

Pour le dernier détour du défunt par chez lui, avant le départ au cimetière, le corbillard ne peut s'aventurer dans ces quartiers aux allures de « cours d'eau en furie », tant les eaux noieraient le véhicule, à défaut du cercueil.

C'est la famille qui s'acquitte de ce portage. Obligation aux porteurs de la bière, d'avoir le pied ferme, dans une eau qui charrie immondices et autres déchets infects, afin d'éviter un autre « pire ».

Ces eaux les « suivront » même dans l'église où sera dite la «  messe des morts », au point que prêtre et servants de messe officieront du haut de l'estrade, évitant de tremper chaussures et pantalons, pour encenser le cercueil, donnant à la famille un sentiment de choses faites à moitié. Hélas...

Même au cimetière, non épargné par les eaux, où les dégats se constatent par des tombes emportées, la famille devra s'employer à vider préalablement la fosse innondée, avant l'enterrement.

Les inondations récurrentes dans presque toute la ville et surtout dans les quartiers où des ouvrages devant les contenir ont été réalisés, montrent l'étendue du chantier qui semble être la résultante de nombreuses années inertie pour les autorités de la capitale.

Dans un élan presque cupide de devoir gérer une ville sortie de ses limites, aucun plan d'assainissement conséquent n'a suivi l'édification de cette ville élastique, sans plan directeur.

Si le centre-ville et ses quartiers alentours présentent les commodités d'une ville moderne, le décor est tout autre, une fois que l'on a franchit les limites de l'ancienne ville et que l'on est dans ces quartiers annexés à la capitale par la force des choses.

Les voiries urbaines, les systèmes d'adduction d'eau, le réseau électrique ou routier ou encore le ravinement outrancier non endigué, renvoient à un village dont nul n'a la responsabilité. Et les populations vivent un réel sentiment d'abandon.

Bertrand BOUKAKA/Les Échos du Congo-Brazzaville