Contrairement aux discours martiaux auxquels on était habitué il y a quelques mois, la recherche de la paix dans le Pool par la voie du dialogue et de la conciliation semble désormais prendre place auprès des Forces en belligérance. Cette volonté unanimement saluée, ne peut s'enclencher qu'à la condition que déjà, les armes se taisent.
Les grands théoriciens de la guerre ou de la diplomatie s'accordent à dire que « la paix par les armes est une guerre en sursis ».
De ce point de vue, discutable en rares égards, il se dégage tout de même le net constat que « la guerre ne règle rien. Elle ne fait qu'aggraver l'état des déséquilibres qui conduisent à la guerre, en creusant de plus en plus les schismes de la division et en installant pour bien longtemps, la haine et le sentiment de vengeance, dans les cœurs des vaincus. »
Quand un conflit intra-national s'éternise, les dommages collatéraux, du fait de leur multiplicité, deviennent assimilables à des faits de guerre, pour ceux qui en sont victimes. Le doute s'installe dans les esprits et la neutralité, même des forces gouvernementales devient sujette à caution, auprès des populations en qui naît le « syndrome de Stockholm », alimenté par les accointances géographiques, ethniques ou tribales. Cette dimension sociale a fait qu'en Colombie par exemple, le conflit entre le gouvernement et les Farc s'est éternisé des décennies durant. Seul le dialogue a conduit à la paix.
Plus le conflit s'étend dans la durée, plus on perd de vue la raison première qui l'a déclenché. Bavures et cruauté s'installent, du fait que l'on voit mourir ses frères d'armes. Même l'armée la plus disciplinée du monde ne peut y faire face, à défaut d'envoyer des unités entières en cour martiale. Plus personne ne peux dire, qui a tort, qui a raison, car les différentes péripéties au cours des opérations ont engendré dans les parties en belligérance, des faits répréhensibles, susceptibles d'être condamnés. Alors, qui condamner et qui absoudre ?
Ce n'est point une faiblesse pour les officiels congolais, que d'initier le dialogue pour résoudre la crise du Pool, ainsi que le claironnent certaines voix.
Chaque jours, des gens meurent dans le Pool. Du fait des armes, ou des conséquences des faits d'armes. Puissent ceux qui claironnent convenir avec le proverbe Peul : « seul le poulet ajourné de l'abattoir connaît l'agonie du couteau ». Ce poulet a vu mourir les siens et accepterait tout compromis qui lui épargnerait le supplice. Pour les autres, qui épiloguent à propos, cela relève de l'imaginaire.
La décision de se sublimer, prise par le président Denis Sassou N'Guesso, relayée par le président de l'assemblée nationale Isidore Mvouba, acceptée, quoique assortie de conditions par le pasteur Ntoumi, participe d'un acte de courage.
Le courage disait Jules Ferry, « ce n'est pas de laisser aux mains de la force, la solution des conflits que la raison peut résoudre. »
Il en faut, une sacrée dose de courage, quand on sait que le conflit a produit un bilan humain et sociologique que nul ne pourra réparer.
Le matériel, on s'en fiche. De nos jours, de zones géographiques sont dévastées par les effets du climat au point que les dommages sont assimilables à ceux d'une guerre de destruction massive. On s'en relève, car le matériel est le fruit des efforts des vivants.
La main tendue par le président de l'assemblée nationale, Isidore Mvouba devra constituer le terreau favorable à l'éclosion de la paix. Cet état de non-guerre qui permettra aux populations meurtries innocemment prises en otages par les forces belligérantes, à avoir enfin le « droit à la vie, à la liberté et à la recherche du bonheur ».
Dans la recherche de cette paix, deux actes majeurs posés par le président Denis Sassou N'Guesso ont sans doute échappé à la perspicacité de nombreux congolais, qui n'ont peut-être pas su décrypter l'essence de certaines décisions politiques de ces derniers temps.
On ne peut se mentir, Denis Sassou N'Guesso a qu'on le veuille ou pas, imposé à travers son parti qui en a remporté le vote, Isidore Mvouba à la présidence de l'assemblée nationale, lui donnant ainsi les clés pour engager le pays dans sa sphère de compétence et notamment, la résolution du conflit du Pool.
D'autres part, la paix véritable participe de ce que les détenteurs inappropriés des armes de guerre retrouvent en les déposant, une reconversion socio-économique qui s'inscrit dans l'optique de la paix. Cette tache, Denis Sassou N'Guesso l'a confiée à Euloge Landry Kolelas.
Ainsi présenté, c'est le Pool avant tout, avec ses fils et ses filles qui est interpellé, dans sa cosmogonie, dans sa sociologie, dans son historicité qui ne manquent pas de symboles susceptibles d'alimenter la conscience des uns et des autres, devisant dans la même langue pourquoi pas, gommant de facto les aspérités des traductions susceptibles d'interprétations erronées. Les autres départements du Congo ne formeront qu'une chaîne de solidarité.
Les musicologues originaires de la région du Pool recommanderaient à cet effet, pour la méditation de tous, les chansons « Ba ta Mbiémo » de Kosmos Moutouari, « Bibelo » de Théo Blaise Kounkou et Lubambu de Michel Rafa. Trois titres prémonitoires peut-être, mais surtout fédérateurs.
Bertrand BOUKAKA